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puritaine pour l’austérité missionnaire. Enfin il n’est pas jusqu’à « M. de Saint-Laurent » qui ne put lui servir à quelque chose. Ce gentilhomme parait être le diplomate qu’Hugues de Lyonne députa en 1668 auprès de Nicolas Pavillon, l’intransigeant évêque, pour lui faire souscrire l’astucieuse « paix » de l’Église : il fit sinon connaître, au moins, apprécier à Bossuet ce « prélat indépendant » et énergique, — avec lequel nous le trouverons tout à l’heure en correspondance, — en même temps qu’il pouvait fortifier chez lui ce sens humain, — dont ses premières expériences avaient mis en lui le germe, des transactions obligées.

Bossuet s’est glorifié plus tard, — et à une date où pourtant il se fermait souvent avec rudesse, — « d’apprendre sans cesse, d’apprendre de tous : » les pensionnaires de la « maison de famille » du Doyenné de Saint-Thomas du Louvre ont pu contribuer à son éducation encore ouverte.

Et qui sait si, dans cette formation dernière de son esprit mûrissant, le « quartier » ne fut pas aussi pour quelque chose ?

Non point, bien entendu, par cette influence des spectacles matériels, par cet effluve des choses, qui, dit-on, est sur certaines gens si fort qu’il les moule et les détermine... L’émotion que produisait sur les sensitifs du XVIIe siècle ce Louvre que Bossuet voyait chaque jour, le vieux Sauvai la décrit non sans finesse, en ses Antiquités de Paris. Les admirateurs du vieux palais soutiennent, remarque-t-il, que l’apparence de ses « dehors, » dans leur « masse nue et grossière » est « toute royale et pleine d’esprit ; » que « leur solidité ravit et étonne tout ensemble, » et même qu’elle semble « représenter assez bien la grandeur et la gravité de nos rois ; que l’extérieur du palais d’un grand prince ne saurait être trop terrible ; que le peuple, qui porte son jugement dans ses yeux, considère avec bien plus de vénération et de crainte son maître renfermé dans un bâtiment dont l’ordonnance est si fière et si sévère ; qu’il prend ses pavillons informes pour de bons bastions et l’œuvre tout entier pour une citadelle, et qu’il s’imagine que d’un lieu si rude et si majestueux il ne part que des foudres. »

Bossuet était, nous l’avons vu, trop réfractaire à tous les « dehors, » pour que le Louvre ait eu sur lui ce prestige intimidant. Il n’y a certainement point lieu d’attribuer à l’image du vieil édifice, près duquel il passa de longues années, la moindre