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actes notariés soient rédigés en allemand, ils dépassent la mesure. Le français est devenu la langue officielle du pays : il le restera. J’admets fort bien qu’on choisisse, comme juges de bailliages (l’équivalent approximatif des juges de paix français), des juristes qui parlent le dialecte alsacien. Je trouve encore tout naturel que, dans les tribunaux régionaux, il y ait des magistrats capables d’interroger les prévenus et les témoins dans leur langue maternelle. Il est indispensable qu’un notaire de campagne puisse s’entretenir avec ses clients sans recourir à l’office d’un interprète. Mais les actes officiels doivent être rédigés en français. Rien n’empêchera, pendant un certain temps, de délivrer, à ceux qui en exprimeront le désir, une traduction certifiée conforme à l’original.

Il est tout aussi dangereux de vouloir prétendre que l’Alsace et la Lorraine, étant des pays frontières, doivent rester indéfiniment des pays de « double culture, » et d’essayer de donner, sous ce fallacieux prétexte, un caractère linguistique mixte à l’enseignement secondaire et supérieur.

En ces questions, qui intéressent avant tout la vie nationale, on ne saurait procéder avec trop de mesure, mais aussi avec une logique trop rigoureuse. Bon nombre d’Alsaciens et de Lorrains ne possèdent pas encore suffisamment la langue française. On devra largement tenir compte de cette lacune, dont ils ne sauraient être rendus responsables. Mais le but à poursuivre méthodiquement est et doit rester de leur assurer cette connaissance par les moyens les plus appropriés et dans les délais les plus courts. L’intérêt des désannexés, comme celui de la France l’exigent.

Pour l’heure, de même qu’une législation transitoire s’impose, le Commissariat général devra, autant que cela sera possible, faire appel, pour le recrutement du personnel administratif, à la « main-d’œuvre » indigène, et cela pour deux motifs : d’abord parce que les fonctionnaires venant du reste de la France ignorent tout des institutions de nos deux provinces, et ensuite parce qu’il est indispensable que les représentants de l’autorité puissent s’entretenir avec leurs administrés. Les échanges de personnel, qui se font couramment entre les autres départements, deviendront possibles plus tard, quand l’assimilation sera plus complète.

On m’objectera peut-être qu’avec ce système l’assimilation