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précédé d’un tambour et d’un porte-drapeau, devant l’église Notre-Dame, où devait être chanté un Te Deum pour la prise de Vienne. Les portes étant fermées et gardées par des conjurés, le gouvernement, entier eût été capturé d’un seul coup de filet ; Malet eût repris alors les formules de sa conspiration de 1808, forçant les uns à signer les ordres qu’il leur dicterait, les autres à les exécuter, etc.

Tout était-il ici, comme on serait tenté de le croire, de l’invention de Sorbi ? Une déposition étrange de Rigomer Bazin, arrêté le 22 juin pour avoir rompu son ban d’exil, semblait y apporter quelque confirmation. Bazin affirmait que l’union des royalistes et des républicains était conclue contre l’Empereur, et rapportait les conversations engagées entre les agents les plus actifs des partis d’opposition. Tout cela était vraisemblable, mais on n’attacha point à ces révélations une importance majeure : on prit seulement des précautions « pour prévenir cette incartade » et Malet y gagna d’être transféré à Sainte-Pélagie.

De Sainte-Pélagie, le 18 août, il adresse une lettre d’instances à Fouché. Il réitère le 9 octobre par une lettre à Savary. Il demande d’être éloigné de Paris sur « sa parole d’honneur de n’y revenir que lorsque Son Excellence le jugera convenable. » Le 4 janvier 1810, il écrit au préfet : « Ma santé, très délabrée depuis la maladie que j’ai faite à la Force et qui se prolonge beaucoup plus que je n’aurais dû l’attendre, me force à vous demander, monsieur, de vouloir bien me faire transférer dans la maison de santé de M. Dubuisson, barrière du Trône, où je pourrai attendre d’une manière plus décente et plus salubre, le moment où la justice de l’Empereur daignera s’étendre jusqu’à moi. Les marques d’intérêt que vous avez bien voulu me donner dans le temps, monsieur, et qui sont restées sans effet, sûrement parce que vous n’avez pu faire mieux, me donnent la confiance que vous voudrez bien m’accorder une chose exigée par le dépérissement de ma santé et réclamée par l’humanité. »

Cette demande, en date du 4 janvier, fut agréée le 12 ; accordé pour qu’il reste en détention. Malet fut donc transféré dans cette maison Dubuisson, au haut du faubourg Saint-Antoine. C’était près de la barrière du Trône, au coin de la petite rue Saint-Denis-Saint-Antoine, une vaste construction se