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dans les années 1811, 1812. » A la Force, Guidal attendait, sans impatience, son transfert à Aix où il devait passer au Conseil de Guerre, et il multipliait les certificats de médecin et les démarches pour obtenir des sursis. Ses excellents amis, M. et Mme Paban, de Marseille, étaient d’autant plus empressés à le seconder, que Paban venu à Paris peut-être expressément, était pleinement au courant de la conspiration, à telle enseigne qu’il fut fusillé à Toulon le 21 décembre 1813, sur arrêt de la Commission militaire.

A la vérité, Malet comptait employer certains autres prisonniers d’Etat, un Corse nommé Boccheiampe, qui avait été arrêté en Toscane comme agent des Bourbons ; même deux colonels, Madier de Lamartine, et Faujasde Saint-Fond, compromis dans la capitulation de la Guadeloupe, mais c’étaient des comparses, et il n’avait point désigné Madier et Faujas sur l’ordre de mise en liberté qu’il avait préparé pour le concierge de la Force.

A Lahorie et à Guidal seuls, étaient réservées des missions d’une importance capitale qui exigeaient non seulement une extraordinaire activité et une singulière présence d’esprit, mais une connaissance exacte de Paris et du personnel gouvernemental, puisque Lahorie devait être ministre de la Police à la place de Savary, et Guidal préfet de Police à la place de Pasquier. Ils auraient chacun à apprendre en marchant, un rôle qu’ils n’avaient jamais répété et dont ils ne savaient pas un mot. Lahorie depuis huit ans n’avait point marché dans une rue de Paris ; Guidal non plus. N’importe !

Enhardi à mesure que, dans son imagination, se déroulent les scènes du drame et qu’il en voit le succès, Malet, ayant enfoncé les portes de la Force, risque un coup d’une audace vraiment surprenante. A Rabbe, dont le dévouement à Bonaparte s’est affirmé sans hésitation depuis 1800, qui, comme colonel du 2e régiment de la Garde de Paris, fut un des juges du duc d’Enghien, auquel, comme à l’officier d’extrême confiance, a été confié le commandement de la seule force militaire qui soit à Paris, Malet enverra tout simplement, par un planton, tous les documents politiques et les ordres du jour. Il y en aura des exemplaires pour chacun des deux bataillons, mais ce n’est point assez, Rateau a dit que le colonel pouvait être absent. Il a un congé de quelques jours : il va partir pour