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journée du 30 est des plus violentes ; l’ennemi attaque notamment avec une extrême énergie en direction de Château-Thierry et, le soir, il atteint, à l’Est de cette ville, la Marne entre Brale et Mont Saint-Pré, puis à Jaulgonne. Voulant élargir la poche, au moment où il l’allonge, il attaque furieusement sur les parois Est et Ouest, et à l’Ouest, avec des tanks sur le plateau de Sonnemaison, sur le plateau de l’Orme du Grand-Rozoy. Partout des trous se produisent : le soir du 30, le front semble brisé entre Brécy et Jaulgonne : c’est alors qu’une brigade américaine envoyée à Dégoutte vient défendre le passage de la Marne entre Château-Thierry et Dormans. A 19 heures, la tête de pont de Jaulgonne, défendue pied à pied par sa garnison, est enlevée par l’ennemi ; le pont saute à 20 heures. Le soir de cette terrible journée, le front, à peu près maintenu à l’Ouest de Reims, passe par Ville-en-Tardenois, Romigny, Verneuil où il atteint la Marne qu’il suit jusqu’à Gland, puis court suivant une ligne nettement orientée du Sud au Nord par Bézu Saint-Germain, les lisières Est du bois du Châtelet, Montgru Saint-Hilaire, fait une boucle vers Rozet Saint-Albin (Oulchy ayant été perdu), Vierzy et Chaudun où l’on a à peu près tenu.

L’ennemi, qui voyait néanmoins s’accentuer sur divers points la résistance, était, de ce fait, contraint d’engager de nouvelles forces. Le 31 mai, ce fut en grande partie avec des troupes fraîches qu’il attaqua vers l’Ouest en direction de Longpont, vers le Sud sur Château-Thierry. Mais déjà nos troupes prenaient une attitude offensive et il semblait que, à l’Est comme au Sud, l’ennemi fût bien au bout de ses succès. La forêt de Villers-Cotterets menacée était, dès le matin, dégagée par une contre-attaque de Maud’huy ; plus au Nord nous reprenions Chaudun et le plateau au sud-ouest de Soissons, faisant subir à l’ennemi de lourdes pertes et, malgré sa forte résistance, nous recouvrions les pentes Ouest de la vallée de la Crise. A la vérité, plus au Sud, une nouvelle poche se creusait en direction de Neuilly Saint-Front très menacé et la vallée de l’Ourcq était assez largement ouverte où le général Duchêne jetait immédiatement le corps de cavalerie Robillot. La poussée se faisait enfin très forte au nord de Château-Thierry. Mais les troupes de secours commençaient à affluer : il paraissait douteux, dès le 31 au soir, que la bataille fût portée beaucoup plus loin par l’ennemi ; on constatait que,