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LES
CHANGES PENDANT LA GUERRE
ET
AU LENDEMAIN DE LA PAIX


I. ― GÉNÉRALITÉS. SITUATION D’AVANT-GUERRE

Parmi les problèmes qui se dressent au lendemain de la paix, il en est un qui a pris des dimensions formidables et qui, en dépit de son caractère technique, s’est imposé à l’opinion publique avec une force singulière. C’est celui du change international. La guerre, qui a fait s’entrechoquer sur les champs de bataille les armées de vingt peuples, a en même temps, par une sorte de paradoxe étrange, démontré combien ces peuples ont pris l’habitude de recourir les uns aux autres, pour vendre l’excédent de leur propre production et pour acheter, en échange, un certain nombre de marchandises. De 33 milliards de francs, chiffre de 1869, le commerce extérieur des principales nations du monde s’est élevé à 175 milliards en 1913, c’est-à-dire qu’en moins d’un demi-siècle il a quintuplé. La guerre elle-même n’a pas interrompu ce mouvement prodigieux qui, à chaque minute de l’année, déplace des milliers de tonnes d’objets transportés d’un point à un autre de la planète. En dépit des sinistres bandits de la mer, des torpilleurs allemands qui détruisaient sans merci tous les navires qu’ils pouvaient atteindre, neutres et belligérants ont réussi à continuer, de 1914 à 1918, un commerce se chiffrant par centaines de milliards de francs.