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que nous n’exportions. La différence est de 10 milliards pour le premier semestre de 1919. D’autre part, nous avons accru notre circulation fiduciaire d’une façon désordonnée : elle dépasse 35 milliards de francs, au commencement du mois d’octobre 1919. C’est sous l’action de ces deux causes, que le mouvement de hausse des principaux changes étrangers s’est poursuivi avec une intensité croissante, alors qu’au lendemain de l’armistice il semblait que la situation dût s’améliorer et non s’aggraver pour le vainqueur.

La question de savoir quelle attitude le gouvernement doit prendre au sujet des importations, a été très discutée. Nous croyons pour notre part qu’il a agi sagement en rétablissant à peu près complètement la liberté du commerce. Nous avons malheureusement besoin d’importer beaucoup de matières premières et même, à la suite de notre mauvaise récolte de 1919, d’objets d’alimentation. Quelque pénible qu’il soit d’avoir à payer de ce chef des sommes considérables au dehors, il n’y a pas à hésiter à. le faire. Les matières premières sont nécessaires pour mettre nos usines en mesure d’exporter le plus tôt possible : il faudrait, par exemple, que les lissages de Roubaix et de Tourcoing fussent approvisionnés de façon à fabriquer les étoffes qu’ils vendaient avant la guerre dans de nombreux pays.

Mais si nous approuvons sans réserve cette catégorie d’importations, nous voyons avec inquiétude nos compatriotes se lancer dans la voie de dépenses somptuaires qui provoquent des importations d’articles de luxe, dont nous pourrions nous passer et dont les statistiques douanières accusent l’arrivée pour des sommes importantes. La nation devrait s’imposer une discipline sévère et conformer sa vie aux nécessités de l’heure. N’oublions pas que, si notre triomphe militaire et moral a été complet, nous avons subi, au point de vue économique, des désastres dont il est impossible de nous relever en un jour. L’Allemagne nous en doit la réparation intégrale ; le traité de paix nous la garantit : mais elle ne peut s’accomplir qu’avec le temps. Des dizaines de milliards nous rentreront ; mais ils ne viendront que successivement et il faut, dès aujourd’hui, accélérer notre relèvement, en faisant, pour la plus grande partie, l’avance des sommes que nos ennemis ont à nous rembourser. Nous travaillerons d’autant plus efficacement