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REVUE SCIENTIFIQUE.

les déplacements ont été d’une rapidité incroyable. C’est ainsi que, dans l’espace de moins d’un quart d’heure au milieu de la nuit du 22 au 23, l’aiguille a sauté brusquement d’un degré et quart vers l’Ouest, puis d’un degré vers l’Est.

Or, en même temps, on constatait de graves dérangement dans les transmissions télégraphiques et spécialement dans les câbles sous-marins. Enfin, dans cette même nuit du 22 au 23 mars, on admirait dans presque toute l’Europe et l’Amérique du Nord une magnifique aurore boréale. Elle fut notamment très bien visible, avec ses draperies rayonnantes, dans les environs de Paris. Il est rare que les aurores boréales, si fréquentes dans les latitudes très septentrionales, soient observables dans les latitudes moyennes. Tel fut pourtant le cas de celle-ci.

Enfin, et synchroniquement avec tous ces phénomènes, on observait le passage au méridien du soleil d’un groupe extrêmement imposant de taches. Ces taches, apparues vers le 16 mars au bord du soleil, s’étendaient sur près du cinquième de la largeur du disque et représentaient comme surface près d’un centième de la surface du disque solaire, c’est-à-dire près de 50 fois la surface du globe terrestre tout entier, c’est dire que celui-ci tombant dans une tache solaire de ce genre y disparaîtrait aussi facilement qu’une sardine dans la gueule d’une baleine ; et ceci n’est pas seulement une comparaison, car les deux phénomènes seraient d’une importance absolue à peu près égale.

Quoi qu’il en soit, le synchronisme et l’apparition, le 22-23 mars dernier, d’un violent orage magnétique avec courants telluriques, d’une aurore boréale exceptionnelle et visible sur une grande étendue du globe et d’un groupe important de taches sur le soleil, ne sont pas des phénomènes fortuitement coïncidents. Ce qui le prouve, ce sont les nombreuses données et observations depuis longtemps accumulées à cet égard.

Depuis des années, en effet, on enregistre soigneusement dans un grand nombre d’observations l’importance et le nombre des orages magnétiques. Or les statistiques ainsi dressées établissent nettement qu’il existe un parallélisme frappant entre ces phénomènes et le cycle des taches solaires ; les perturbations magnétiques subissent une périodicité moyenne de onze ans comme les taches solaires, et l’expérience montre que cette périodicité suit dans tous ses détails la courbe représentative de l’activité solaire. Enfin, et ceci n’est pas la chose la moins singulière, le nombre des aurores boréales obser-