Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 6.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

professer pour les Romains une estime sans réserve ; on peut leur reprocher leur orgueil, leur égoïsme féroce, leur culte de la force brutale, leur immoralité publique et privée ; mais telle n’est pas la question. Le régime qu’ils ont imposé à la Gaule lui a procuré, sans tyrannie aucune, trois siècles de calme et de prospérité ; ils l’ont appelée d’emblée, sans tâtonnements, sans secousses, à un degré de civilisation plus avancé que celui auquel elle était arrivée ; ils l’ont défendue par les armes contre les menaces sans cesse renouvelées des hordes germaniques ; ils ont donné à tous, riches et pauvres, plus de bien-être ; ils leur ont assuré, à l’abri des bavards, des brouillons et des ambitieux turbulents, la paix intérieure, nécessaire pour vaquer à leurs affaires, pour développer leur activité, pour s’intéresser aux lettres et aux arts, pour honorer leurs morts et jouir de la société des vivants. Est-ce donc si peu de chose ? Et ne comprend-on pas aisément la reconnaissance des intéressés ? Il faut traverser une période de trouble et de déséquilibre comme la nôtre pour apprécier à sa valeur les mérites d’un pouvoir fort, accepté de tous et obéi.


R. CAGNAT.