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de découvrir, mais de rappeler, — est que la lune présente en effet dans son mouvement orbital une légère accélération anormale qui ne cadre pas avec les éphémérides calculés au moyen des méthodes nouvelles de la mécanique céleste. Cette accélération est faible et ne parait pas excéder quelques secondes d’arc par siècle. On jugera qu’elle est minime, si on veut se souvenir qu’un angle d’une seconde est moins de la trois-cent-millième partie d’un angle droit.

Si petite qu’elle soit, cette accélération séculaire du mouvement de la lune est réelle, et les observations astronomiques avec leurs méthodes infiniment précises l’ont depuis longtemps manifesté. Laplace déjà s’en était préoccupé au début du siècle passé.

On a invoqué récemment la nouvelle loi de gravitation d’Einstein comme étant de nature à rendre compte de cette anomalie du mouvement de la lune, de même qu’elle explique l’accélération séculaire du périhélie de la planète Mercure. Mais un examen attentif montre que cette explication ne doit sans doute pas être la vraie.

L’explication semble être celle que Delaunay a proposée naguère : si le mouvement de la lune parait s’accélérer, si elle semble tourner un peu plus vite autour de la terre, cette accélération n’est qu’une apparence due à ce que la terre tourne un peu moins vite sur elle-même, c’est-à-dire que la durée du jour sidéral augmente. La lune ne va réellement pas plus vite, mais notre unité de temps s’accroît.

Quand on fait le calcul, on trouve que le frottement des océans actuels sur leur fond est tout à fait insuffisant pour rendre compte de l’effet observé, si minime soit-il. Il faut faire intervenir les frottements intenses que produisent vraisemblablement les marées internes dues à la partie encore plus ou moins fluide et visqueuse de l’intérieur du globe terrestre. L’astronome sir G. H. Darwin, fils de l’illustre naturaliste, est même parti de là pour calculer, — d’après l’accélération séculaire de la lune, — la valeur du coefficient de viscosité de l’intérieur de la terre. Si l’on adoptait le coefficient ainsi obtenu, on trouverait pour la durée de l’évolution du système terre-lune plusieurs milliards d’années ; il est vrai que ce nombre doit être très diminué parce que la terre a dû autrefois être beaucoup plus liquide qu’aujourd’hui.

Quoi qu’il en soit, l’accélération séculaire du moyen mouvement de la lune est complètement expliquée si l’on admet que chaque siècle, le temps, compté au moyen du mouvement apparent de la sphère céleste, est en retard de trois secondes sur ce qu’il serait, si la durée de la rotation terrestre était restée la même.