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L’ŒUVRE DE LA FRANCE EN SYRIE.


sables. Les Kémalistes ne manqueront pas non plus d’alliés, car nous aurons bientôt la preuve de leur complicité avec les Chérifiens de Feyçal que nous combattons en Syrie. Enfin, la force morale du Nationalisme turc est considérable, puisque c’est celle de l’Islam même, avec l’appui tacite, mais certain, de la Sublime Porte et de son chef, le Khalifat. Kémal Pacha se vante même de reprendre dans toute son ampleur le rêve panislamique et pantouranien, fût-ce au prix d’une alliance avec les Rouges. Aux deux grandes Puissances musulmanes, l’Angleterre et la France, il prétend arracher leurs plus belles parures : l’Inde et l’Afrique du Nord.

Voilà à quels adversaires nous allons avoir affaire sur le front Nord, tandis que la famille du grand Chérif de la Mecque nous combattra, à l’Est, en Syrie continentale.

Pour faire face à ce nouveau danger, le général Gouraud doit restreindre le front de la division Dufieux, à laquelle serait sans cela imposée la continuité d’une charge au-dessus de ses forces ; la division de Lamothe reçoit tous les territoires situés à l’Est de l’Amanus.

C’est donc à ces deux chefs, les généraux Dufieux et de Lamothe, que va revenir la mission d’assurer la sécurité du front Nord de l’armée du Levant.

Tous ceux qui, pendant la guerre, ont connu le général Dufieux, admirent sa droiture, son courage, sa puissance de travail, son affection pour la troupe. Il fut, pendant l’année décisive, le chef du troisième bureau de l’État-major général du maréchal Pétain dont l’ennemi eut tant à souffrir. Il fut aussi le chef d’une de nos plus braves divisions. Et le général Gouraud savait mieux que personne à qui il confiait la division de Cilicie, quand il mettait à sa tête l’homme qu’il avait eu pendant un an comme chef d’État-major au Maroc, lors de la marche sur Taza, le général qu’il avait eu la joie de retrouver à Strasbourg. Le général Dufieux, chef militaire, était secondé pour la partie politique et administrative de sa tâche par le colonel Brémond, connu depuis les affaires de Fez en 1912, et auteur d’un important ouvrage sur l’Arménie.

Le général de Lamothe est un maître en politique indigène. Il est un des meilleurs élèves du général Lyautey. Tout finesse, souplesse et énergie, le général de Lamothe présentait, de par son passé de colonial et de « marocain, » le maximum de