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Ainsi, pour le relativiste, l’univers peut être illimité, sans être infini. Quant au pragmatiste qui marche droit devant lui, — c’est-à-dire qui suit ce qu’il appelle une ligne droite : le trajet de la lumière, — il finira forcément par retrouver l’astre d’où il est parti, pourvu qu’il dispose d’un temps suffisant. Il dira donc, si telle est la nature des choses : l’univers n’est pas infini.

L’infinité ou la finité de l’univers peut donc en principe être contrôlée par l’expérience, et on pourra vérifier quelque jour si le cosmos dans son ensemble et si l’espace sont newtoniens ou einsteiniens. Malheureusement, c’est une expérience de très longue haleine et qui soulèvera quelques petites difficultés pratiques. C’est donc jusqu’à nouvel ordre seulement par ses conséquences indirectes que l’on pourra vérifier si cette conception einsteinienne est exacte. Retenons-en ce fait essentiel : selon Einstein, la masse totale de matière contenue dans notre univers, la masse totale des étoiles est finie, limitée, déterminée. C’est en partant de ce résultat, ou plutôt de cette hypothèse, qu’Einstein a conduit à bien sa théorie de la rotation, et comme cette théorie cadre admirablement avec les faits, elle constitue elle-même un argument de poids en faveur de l’hypothèse qui sert de prémisse.

De même que la matière présente dans l’univers contribue à créer en chaque point le champ de gravitation qui y règne, selon la conception einsteinienne que j’ai exposée ailleurs (loc. cit.), de même l’inertie de chaque point matériel dépend de l’influence des autres masses qui lui sont extérieures, car, — Einstein l’a lumineusement démontré, — l’inertie et la pesanteur d’un objet ne sont en réalité que deux aspects d’une même qualité de cet objet. Si nous nous trouvons en n’importe quel lieu de l’espace céleste supposé rempli de matière d’une manière à peu près homogène, et que nous soyons sans mouvement par rapport à cette matière, les équations gravitationnelles d’Einstein ont des valeurs bien déterminées de leurs coefficients caractéristiques. Elles définissent le champ de gravitation produit par les étoiles dans le système de repères, dans le système de références de la matière immobile. Un point au repos reste ici au repos d’une manière permanente. Transportons-nous maintenant dans un système de repères qui tourne d’un mouvement uniforme par rapport à l’ensemble des masses de l’univers, les coefficients des équations d’Einstein prendront de nouvelles valeurs. Et