Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 11.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

allemande. Or, après vingt mois d’occupation, les contributions prélevées dépassent cinq fois le budget municipal.


IV

Pendant l’année 1917 et jusqu’à la fin de la guerre, le fardeau devient de plus en plus écrasant pour la Ville qui sent que désormais toute résistance est impossible et qu’il faut à tout prix éviter les sanctions mises en mouvement par la Kommandantur. N’oublions pas qu’à ce moment, les prises d’otages, les envois dans les camps de concentration, les évacuations forcées de femmes et de jeunes filles étaient les procédés courants employés par l’autorité allemande pour imposer sa volonté.

Lille, déjà grevée d’un ensemble de charges de plusieurs centaines de millions, doit faire face, en avril 1917, à une contribution de 24 500 000 francs, dont la moitié payable de suite, avec la mention que, pour chaque jour de retard, l’amende sera portée à 400 000 francs, et en maintenant le principe que la Ville est solidairement responsable, avec toutes les communes du territoire occupé, de la totalité imposée à cette zone. Ainsi les sommes qui ne seraient pas versées, en temps voulu, par l’une d’elles devraient être perçues entièrement auprès de chacune des autres communes, ce qui pouvait porter, éventuellement, la contribution jusqu’au chiffre de 28 millions.

Trois mois après, c’est une nouvelle somme de 33 millions qui est requise, dans les mêmes conditions, pour couvrir les frais d’entretien de l’armée et de l’administration du territoire occupé, cette somme payable dans un délai de deux mois, avec amende de dix pour cent pour chaque jour de retard.

C’est le coup de grâce. A la date du 13 juillet 1917, le maire expose au Conseil municipal cette situation, en faisant ressortir que la Ville est sous la menace de nouvelles mesures de rigueur atteignant la santé publique, les biens des particuliers, leur liberté et leur existence même. Toute résistance serait infailliblement brisée par l’autorité allemande, qui ferait subir des représailles implacables à une population hors d’état de supporter de nouvelles souffrances physiques ou morales, après trois années d’occupation étrangère.

La protestation du maire, adressée au général von Grævenitz, résume toute cette douloureuse histoire, dans un raccourci