Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 11.djvu/266

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’est pas exact : ils les ont coudoyés dans la tranchée, et je suis très heureux de rajeunir ce souvenir, d’être l’occasion d’un nouveau rapprochement qui, je l’espère bien, se renouvellera.


LA GUADELOUPE

Nous appareillons le 26 à sept heures pour la Guadeloupe. Par ce temps magnifique, entre les deux iles sœurs, c’est vraiment une navigation de plaisance. Nous voyons à tribord le haut sommet de l’ile anglaise La Dominique, puis ses côtes verdoyantes, ensuite les cinq îlots des Saintes, dont trois seulement sont habitées ; nous avions commencé la fortification de la belle rade qu’elles forment, et un ancien projet, abandonné depuis longtemps, y voyait un point d’appui de la flotte. C’est là que, pendant la guerre de l’Indépendance américaine, le 12 avril 1782, la flotte anglaise de l’amiral Rodney battit la flotte française du comte de Grasse, après des manœuvres où s’étalèrent les vices de notre stratégie navale à cette époque, où le but de la guerre, qui devait rester sur mer comme sur terre la destruction de l’ennemi, était perdu de vue, et où tout était sacrifié à la conservation du matériel.

Nous arrivons en vue de Basse-Terre, la capitale de l’île. Le gouverneur, M. Duprat, vient nous chercher à bord et nous emmène dîner dans sa villa, où un grand bal me permet ensuite de voir ses principaux administrés.

La date impérative de mon arrivée à Lima est le 24 juillet, car les fêtes du Centenaire du Pérou doivent commencer le 26. Ma visite est attendue à Guatemala ; je suis donc étroitement limité, et, malgré mes regrets, je ne pourrai passer que quarante-huit heures à la Guadeloupe. Mes nouveaux hôtes sont un peu déçus par cette hâte que je déplore, mais ils comprennent les nécessités de ma mission ; malgré la rivalité centenaire entre les deux îles, ils ne m’en veulent pas trop de leur consacrer si peu de temps : en tout cas, rien ne le marque dans leur accueil, semblable à celui de la Martinique.

Le lendemain, j’inspecte le petit détachement et ses casernements, mais je vais déposer une couronne sur la tombe du général Richepanse, mort à trente-deux ans, dit simplement son épitaphe. Le lieutenant de Hoche, de Joubert et de Marceau, le divisionnaire de l’armée du Rhin dont l’initiative décida de la