y a fait la sainte communion [1]. Il mène ici la vie la plus sérieuse, ne va pas dans le monde et se tient appliqué à l’œuvre entreprise. lia pris pour sujet de son oratorio la Rédemption, et lui-même fait son poème, ce qui est le meilleur parti. Ce poème est quasi achevé. Charles me l’a lu, j’en suis parfaitement content. Il y a là tout le cadre d’un chef-d’œuvre : c’est on ne peut plus convenable comme poésie et on ne peut mieux comme donnée musicale. Ce qu’il a fait déjà de musique est, à mon sens, très remarquable. Puis, je le sens lancé, et lui-même a conscience d’avoir trouvé le joint. Il ne rentrera à Paris qu’en mars. Hélas ! que je voudrais qu’il y put conserver quelque chose du calme de Rome, qui lui est si bon et, à certains égards, si nécessaire ! Liszt est parti pour trois mois. »
Quelques années plus tard, à la fin de la guerre de 1870-71, c’est pour trois ans que Gounod devait partir. Triste départ, et plus triste séjour en ce Londres dont Gounod jadis avait écrit : « Ce ne serait pas ma ville, » et qui trop longtemps fut non-seulement sa ville, mais, comme il le reconnut lui-même après qu’il en fut sorti, sa prison. Tous les biographes du maître ont conté l’histoire de cette « chaîne anglaise » [2] ou de cette « Gounodyssée, » ainsi que s’exprima l’héroïne elle-même. En 1874, l’ancien musicien d’Ulysse, autre Ulysse lui-même, délivré par des amis, revoyait Ithaque et Pénélope. L’abbé Gay fut l’un des premiers à saluer son retour. Il écrit, le 6 juillet 1874 : « Je pousserai jusqu’à M(orainville), où notre pauvre Charles m’appelle et m’attend. En arrivant en Normandie, il m’a écrit une lettre vraiment excellente. Il a besoin de moi et me réclame avec un vrai cri du cœur. Tu penses si j’y répondrai ! »
Voici l’effet et le bienfait de cette réponse. (Lettre de Gounod à l’abbé Gay, 9 août 1874) :
« Quelle douce joie ç’a été pour moi de te revoir et de te ravoir ! Nous ne sommes donc plus séparés, et je ne sens plus le poids de ce mot que la douleur arrachait à la tendresse pour moi : « Il me semble que je ne le connais plus. » Hélas ! c’était parce que tu me connaissais trop que tu ne me reconnaissais plus. Maintenant, me revoici. Tunc dixi : Ecce venio ut faciam. Domine, valuntatem tuam... Il me semble qu’il se passe en moi