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quelque chose d’analogue à ce qui se passe dans le feu quand il va commencer à prendre. La chaleur doit y précéder et y produire la flamme qui en est la lumière et la joie ; mais avant d’être joyeux, il faut qu’il soit ardent. J’ai parfois de ces instants rapides et fugitifs de lumière vive, comme les premières échappées de flamme qui se produisent au milieu de l’épaisse fumée et qui la remplacent à mesure que le bois se consume davantage. Hélas ! mon bois est resté si longtemps vert et humide qu’il a bien de la peine à brûler. Mais enfin, j’espère qu’il finira par se consumer. »

La lecture d’un ouvrage de spiritualité que l’abbé Gay publiait alors[1] exaltait la flamme encore une fois renouvelée :

« J’ai été tout de suite, par instinct, par grâce sans doute, au traité de l’humilité, dans le désir, l’espoir, la confiance d’y rencontrer tant de leçons dont j’ai besoin, et de rentrer, après des classes si mal faites, dans cette classe de l’élémentaire, du rudiment, des fondations, qui seule, je le sais bien, peut assurer et orienter le succès du transcendant chez ceux qui s’élèvent jusqu’à ce parfait degré ou état du « mystique. »

« Outre que j’ai senti, touché, entendu à chaque ligne l’âme qui vit en Dieu et en qui Dieu vit, j’y ai trouvé parfois de ces mots qui ont vu Dieu et qui sont comme un éclair retenu et fixé ; de ces mots absolument propres à ce même et seul Esprit saint qui a dicté les saintes Écritures et qui appartiennent au vocabulaire, ou, pour mieux dire, au langage des choses divines. Au reste, partout ce calme, cette tranquillité, cette sérénité de regard et d’expression, cette vérité de ressemblance, qui dénotent le témoin quotidien, constant, attentif et fidèle des opérations divines accomplies soit en lui-même, soit dans les âmes dont il a eu le spectacle…

« Que tu es heureux, cher ami, d’être un de ces vases d’élection en qui Dieu se verse pour être répandu sur les créatures ! Et que je bénis Dieu de t’avoir choisi, (puisque je te connais et que je t’aime,) pour être un des instruments de sa gloire et de sa miséricorde !

… Prie pour que j’apprenne à ne rien donner aux autres qui ne vienne de Dieu, puisque tout ce qui vient d’ailleurs que de Lui n’est que la mort et ne peut donner que la mort. Prie pour que

  1. De la vie et des vertus chrétiennes considérées dans l’état religieux.