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du quatrième évangile, parlant de ceux qui ne sont nés ni du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté humaine, mais de Dieu. Il y a là de quoi monter sans s’arrêter jamais et on y comprend comment Dieu a aimé les siens dans le monde, non seulement jusqu’à la fin du monde, mais jusqu’à cette fin qui est son éternité même. C’est là grâce à lui, que nous espérons nous retrouver et aimer aussi jusqu’à la fin éternelle ceux que nous avons aimés ici-bas. »

Mgr Gay se réjouit sans doute, — et, moins humble, il s’en fût applaudi lui-même, — de trouver à cet adieu, à cet « au revoir » le sens et le son d’un Amen. Son œuvre, l’une de ses œuvres, et qui ne lui fut pas la moins chère, était achevée. Deux jours avant de mourir, comme un de ses neveux le quittait pour aller au concert, il lui dit : « N’oublie pas de me rapporter le programme : la musique est le seul de vos plaisirs qui me touche encore. » La musique ! Depuis sa jeunesse, il en avait sacrifié, mais non point abjuré l’amour. Et cet amour, il l’avait en quelque sorte reporté sur l’œuvre et sur l’âme d’un grand musicien. « Je sais, écrivait-il autrefois à Gounod, je sais ton âme par cœur. Ce n’est qu’en Dieu qu’elle peut se reposer, se dilater et fleurir. » Si cette âme, après avoir souvent connu l’agitation et le trouble, finit par se reposer en Dieu, si pour jamais elle s’y repose, il est juste de saluer et d’honorer en Mgr Gay le saint ouvrier de son repos.


CAMILLE BELLAIGUE.