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Il y a lieu de considérer comme ne possédant qu’une valeur très minime tous les arguments théoriques ou a priori par lesquels on serait tenté de rejeter d’emblée les phénomènes dits métapsychiques (tels qu’ils ont été définis dans notre étude rappelée ci-dessus.) C’est ainsi que, transposant un mot célèbre de Crookes (Je ne dis pas que c’est possible, Je dis que cela est), j’avais été amené, pour conclure cette précédente étude, à dire qu’il convient d’aborder l’examen des phénomènes métapsychiques en se disant : « Je ne dis pas que c’est impossible, je dis qu’il faut prouver que cela est. »

Or, il n’est que deux manières de rechercher cette preuve : 1° l’expérimentation et l’observation personnelles ; 2° l’étude des témoignages des autres expérimentateurs et observateurs.

Celui des phénomènes métapsychiques, dont je voudrais sommairement aborder aujourd’hui étude, est le phénomène de matérialisation que le professeur Richet a appelé, d’un mot heureux et dès aujourd’hui classique, l’« ectoplasme. »

Mais auparavant, et afin de déblayer le terrain, il convient que nous repoussions du pied un état d’esprit plus déplorable encore que l’apriorisme soi-disant rationnel, et qui n’est pas moins fâcheux pour l’étude consciencieuse de ces problèmes : je veux parler des plaisanteries et des sarcasmes qui conduisent à dénier a priori toute réalité aux faits métapsychiques, sous prétexte qu’ils sont ridicules. La nature ne se soucie pas du ridicule qui est quelque chose de subjectif et de très artificiellement humain, et nous la voyons dans quelques-uns des actes les plus fréquents et les plus utiles de tous les êtres vivants, franchir sans vergogne et sans cesse les petites bornes anthropomorphiques dudit « ridicule. » Ces actes en sont-ils moins accomplis pour cela, en sont-ils moins réels ?

Il n’y a jamais rien de ridicule à étudier les phénomènes de la nature, quels qu’ils soient, et à chercher la vérité. Et même s’il devait être prouvé que les phénomènes qu’on étudie ont été causés par des supercheries, ce serait encore servir la vérité que d’étudier ces produits de la supercherie. Nous ne pouvons donc que réprouver certaines attaques, d’ailleurs négligeables et sans portée, qui se sont dessinées dans ce sens contre l’homme qui a eu le courage de porter devant le monde savant l’étude de ces questions réprouvées. Le maître Charles Richet est un des plus vastes cerveaux de ce temps, et, même s’il devait être démontré que certaines des expériences métapsychiques auxquelles on l’a fait assister ont été frauduleusement truquées,