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où le sang noir prédomine sur la côte, — il y est d’importation récente, — le, sang indien sur le plateau, avec beaucoup de métissage, et quelques beaux types de purs Espagnols. Les alcades se présentent très dignement, ayant à la main leur canne de commandement à pomme d’or ; tous rendent hommage à la France, qui a sauvé le monde de l’abjecte tyrannie dont il était menacé. La diversité d’expression dans ces sentiments communs en montre la spontanéité. La foule est très démonstrative et les cris de « Viva la Francia ! » retentissent longuement.

Mais les arrêts qui se prolongent un peu et les petits incidents de la route nous retardent. Nous arrivons à Guatemala à onze heures et demie, alors qu’on nous y attendait vers huit heures… Pourtant, les grands halls de la gare regorgent d’une foule épaisse ; sur le quai, les ministres, la municipalité, tous les officiers de la garnison nous attendent. Ils me souhaitent une chaleureuse bienvenue, que souligne une excellente musique militaire.

À la sortie, une population compacte pousse de longues acclamations ; la grande place est remplie entièrement. « Tous ceux-ci attendent depuis quatre heures, m’explique-t-on. Ah ! si vous étiez arrivés à l’heure ! Les cent mille habitants de Guatemala étaient l), sur ces boulevards allant à votre hôtel, faute d’avoir pu accéder à la Place ! »

Nos automobiles démarrent lentement, car la foule les entoure. Puis leur vitesse s’accélère et ils sèment en route les fanatiques qui essaient vainement de les suivre. Quelques-uns se cramponnent aux marchepieds, après s’être excusés courtoisement, mais ils ont une telle expression de dévotion exaltée qu’il est vraiment impossible de les écarter.

Notre excellent déjeuner du train était vraiment un peu loin quand nous nous sommes mis à table, à une heure du matin, devant un splendide diner-souper qu’arrosent les vins de France. La salle à manger était singulière, avec de hautes boiseries en bois précieux de très bel et très sobre effet, et un plafond surchargé d’exubérantes moulures en stuc multicolore d’un goût exactement opposé ; le même contraste s’observait dans tout le bel hôtel Imperio devenu notre demeure pour deux jours et trois nuits : car ici encore il faudra mettre les bouchées doubles.

Le lendemain 6 juillet, je rends ma visite officielle au Président