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Notre influence y trouve un centre de rayonnement très actif.

Mais ce n’est pas assez des réceptions officielles et des démonstrations populaires. La société de Guatemala, qui a déjà organisé notre séjour à l’hôtel Imperio, d’accord avec le Gouvernement, nous offre un grand bal, qui nous permet de prendre contact avec elle ; c’est d’autant plus facile que la connaissance de la langue française est très répandue. Beaucoup de dames ont séjourné en France ; plusieurs y ont été élevées ; elles portent nos robes, mais épurées des outrances qui les rendent parfois déplaisantes. L’ensemble est très brillant, tout en restant du meilleur goût. On est très heureux du passage de l’ambassade française, qui permet de témoigner pour notre pays une admiration affectueuse.

Nous faisons connaissance avec un instrument original : c’est un xylophone, long clavier horizontal dont deux ou trois musiciens frappent les touches de bois avec des baguettes terminées par des boules en caoutchouc ; les vibrations des touches se transmettent à des tuyaux de bois sonore, disposés verticalement. On me dit que c’est un instrument indien, perfectionné par les Espagnols ; les noirs de Guinée et du Soudan ont aussi des xylophones dont les touches, au lieu de venir frapper des tuyaux de bois, vibrent sur des calebasses. Tous ces instruments donnent la gamme complète et on en tire un parti remarquable. Il serait curieux de rechercher si le balafon du Soudan et le xylophone du Guatemala ont une origine commune.

Nos courses à l’extérieur nous ont permis de connaître l’ensemble de la capitale, qui a 120 000 habitants ; une promenade en automobile nous en montre les environs. Cette belle ville de Guatemala a été ravagée en 1917 par un tremblement de terre qui a détruit à peu près entièrement les édifices de la conquête espagnole, églises, couvents, hôtels des hauts fonctionnaires et des grands seigneurs. On rebâtit en ciment armé, mais bien lentement ; car les matériaux de reconstruction ne peuvent, pour la plupart, venir que de la vieille Europe, où l’homme s’est montré bien plus destructeur qu’ici la nature.

Nous voyons aussi quelques bâtiments criblés de balles et même de traces d’obus : ce sont les souvenirs de la dernière révolution, datant de quelques mois à peine. Ce pays si beau, dont la population est si sympathique, sera-t-il toujours ravagé alternativement par les tremblements de terre et les révolutions ?