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rébellion connue sous le nom de Fronde des princes ; Conti rentrait en grâce auprès du Roi devenu majeur ; et, le 21 février 1654, il se laissait marier à l’une des plus jolies nièces de Mazarin, de nouveau ministre tout-puissant.

L’alliance ne flattait pas le prince ; il semblait peu touché de la beauté de sa fiancée, que la voix des courtisans proclamait « une merveille aux cheveux blonds ; » il « épousait, avait-il dit, le cardinal, et pas du tout une femme. » Mais la beauté, le charme, l’intelligence, les vertus, l’amour de la délicieuse Anne-Marie Martinozzi, qu’on épousait par convenance et intérêt, furent les plus forts. Tout de suite, elle aimait ce mari indifférent. Dès la première absence, elle lui écrivait : « Il faut que je vous dise encore que je vous aime de tout mon cœur, et que je me meurs d’envie de te voir, mon cher mari. »

Ce cher mari commença par se montrer fort libertin ; bientôt, il se convertit, et, de sa jeune épouse, « longtemps une honnête païenne, » il fit une chrétienne austère comme lui, et infiniment charitable.

Elle lui donna deux fils, Louis-Armand, qui, marié à Mlle de Blois, fille légitimée de Louis XIV et de Mlle de La Vallière, mourut sans postérité en 1685, et François-Louis, le Grand Conti.

La lettre suivante donne une idée de ce qu’étaient, au lendemain des noces, les relations de l’oncle Mazarin, de sa nièce et de son neveu par alliance.

« Le Roi, écrivait Mazarin au prince de Conti, le 13 juillet 1656, a donné ordre à M. Valot de s’en aller en diligence pour prendre soin de la maladie de Mme la princesse, votre femme ; il est déjà parti, et il pourra être demain de bonne heure à Paris. Je suis en grande peine de son indisposition, car, outre l’amitié et la tendresse que j’ai pour madite dame, je sais que lui faisant l’honneur de l’aimer au point que vous faites, vous serez bien inquiet, tant qu’elle sera dans l’état où elle est à présent. J’espère que Dieu nous fera la grâce de lui rendre la santé. Cependant je vous rends de très humbles grâces des soins que vous avez la bonté de prendre pour elle et je demeure, etc. »


Ce prince de Conti, qui fut longtemps d’église, qui avait rêvé la pourpre romaine, songé sérieusement à entrer dans la Compagnie de Jésus ; qui entretint les troubles du Royaume par la guerre civile, et le scandalisa par ses désordres ; que convertit