Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 11.djvu/610

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un janséniste, et qui fut mis par le cardinal, son oncle, à la tête des armées du Roi en Catalogne, puis en Italie, mourut en 1666, âgé de trente-sept ans, au château de la Grange des Prés, dans son gouvernement de Languedoc. Retz, en le qualifiant dans ces Mémoires de « zéro qui ne multipliait que parce qu’il était prince du sang, » s’est montré d’une malveillance parfaitement injuste. Le prince avait des défauts, mais des qualités plus nombreuses et très rares. Bussy, qui était un aussi bon juge que Retz, a tracé de lui un portrait, charmant, comme il savait les faire, où le prince apparaît doué des dons les plus précieux.

« Il avait la tête fort belle, tant pour le visage que pour les cheveux, et c’était un très grand dommage qu’il eût la taille gâtée : car à cela près c’était un prince accompli... Il avait étudié avec un progrès admirable. Il avait l’esprit vif, net, gai, enclin à la raillerie ; il avait un courage invincible ; et, s’il y avait quelqu’un au monde aussi brave que le prince de Condé, c’était le prince son frère : jamais homme n’a eu l’âme plus belle sur l’intérêt que lui : il comptait l’argent pour rien ; il avait de la bonté et de la tendresse pour ses amis. »

Sa femme vécut jusqu’en 1672. Depuis longtemps alors, la Cour et la Ville, comme Mme de Sévigné, ne voyaient plus en eux qu’« un saint et une sainte. »


LA FORCE.