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est devenu plus tard un personnage important dans la finance. Encore adjudant en 1814, il demanda son congé et l’obtint. Devenu commis d’un receveur général, il était en 1821 trésorier général de la Marine et avait vu son contrat de mariage signé par Charles X et la famille royale. S’il était devenu officier, il serait resté au service. Mais à supposer même qu’il eût été heureux, sa position n’eût jamais valu probablement celle qu’il a acquise. Il s’appelle Marbot et est encore en fonctions.


JE REÇOIS LA LÉGION D’HONNEUR

18 mai. — Je reçois une lettre du Major général de la Grande Armée, prince de Neufchâtel et de Wagram, qui m’annonce que, par décret daté du 17, j’ai été nommé chevalier de la Légion d’honneur sous le n° 33 505. Jamais récompense ne me causa autant de joie. Le commandant fut nommé officier, le capitaine de grenadiers et deux ou trois autres sous-officiers et soldats furent nommés légionnaires. Ceux des capitaines qui ne le furent pas, murmurèrent beaucoup contre le commandant, mais c’était injuste, car il l’avait demandé pour tous.


LES DEUX BATAILLES DE BAUTZEN

20 mai. — Tous les préparatifs d’une bataille générale ayant été terminés le 19 au soir, nous en fûmes prévenus le 20 au matin. On se disposa pour cette grande journée. Vers dix heures, nous nous portâmes en avant pour forcer le passage de la Sprée, ayant la ville de Bautzen située sur l’autre rive. Le passage ne pouvait s’exécuter, faute de ponts. On en établit sur chevalets et, quand les rampes furent praticables, nous le franchîmes rapidement. Toutes les positions furent enlevées et nous laissâmes la ville derrière nous. A sept heures du soir, la bataille était gagnée, et les corps prenaient position pour passer la nuit en carré, car on craignait les surprises de la cavalerie.

Avant de passer la Sprée, le général Compans, commandant notre division, m’avait demandé 15 voltigeurs avec un sergent et un caporal. Il les conduisit lui-même au pied des murs de la ville, leur indiqua une brèche où ils pouvaient passer, leur dit de monter par là de renverser tout ce qui leur ferait obstacle et de se porter ensuite à une porte qu’il leur indiqua pour l’ouvrir. Le sergent monte le premier, il est tué. Le caporal le remplace