Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 11.djvu/922

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’était emparé d’un poste d’aiguilleur situé à un kilomètre de la station Medvedowskaïa. Là se tenait sous pression un train bolchéviste, avec un échelon de forces armées. À l’avant et à l’arrière, le train était muni de plates-formes portant des pièces d’artillerie. La locomotive et un des wagons étaient blindés ; vingt-trois voitures étaient bondées de commissaires et autres personnages de marque. Deux trains blindés, arrêtés un peu plus loin, surveillaient le passage à niveau.

En effet, Sorokine, après notre départ d’Ekaterinodar, s’était mis à notre poursuite. Un détachement, muni d’une forte artillerie, nous avait canonnés dans Gnatschbau. Lui-même, avec le gros des forces, se dirigea vers la gare régulatrice Timochevka, comptant que notre armée et le convoi passeraient parla. Le plan était bien conçu : il n’échoua que grâce au sublime courage de notre héros, le général Markoff.

Lorsque Markoff se fut emparé du poste du passage à niveau, où il fut rejoint par le général Denikine, empruntant la voix du garde-barrière, il avisa la station qu’elle eût à envoyer un train, car les « cadets » (c’est ainsi qu’on nous appelait) approchaient.

Effectivement, un train avança dans notre direction.

Nos deux pièces d’artillerie, les seules que possédât Markoff, avaient été mises en batterie près de la voie, à côté de la maison du poste. Lorsqu’il vit le train des rouges s’approcher lentement, le général Markoff jeta une bombe sur le passage de la machine, tandis que les deux canons ouvraient le feu à bout portant. Le train s’arrêta net. Les nôtres grimpèrent dans les wagons, et massacrèrent tout ce qui fit mine de résister.

C’est à ce moment que j’arrivai sur le théâtre de la lutte.


Dans l’aube qui commençait à poindre, nous nous hâtions de décharger les plates-formes de leurs caisses de munitions. Ainsi notre artillerie allait retrouver la parole : nous étions dans la joie.

Vint à paraître un nouveau train bolchéviste qui accourait au secours du premier. Immédiatement, de la plate-forme du train que nous venions de prendre, nos artilleurs braquant une pièce bolchéviste, ouvrirent un feu si précis, que le train dut fuir à toute vapeur, sans demander son reste.

Nous en profitâmes pour faire passer le convoi et le faire