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je la questionne insidieusement sur sa fille, Mme Wyroubow, sur les fonctions absorbantes qu’elle remplit au Palais, sur la permanente assiduité que lui impose la confiance de l’Impératrice.

— Oh oui ! me dit-elle, ma pauvre Annie est quelquefois bien fatiguée. Jamais un instant de repos !.. Depuis que l’Empereur est aux armées, l’Impératrice est accablée de travail ; elle doit se tenir au courant de tout. Ce bon M. Sturmer la consulte à tout propos. Elle ne s’en plaint pas. Loin de là ! Mais il en résulte naturellement pour ma fille beaucoup de lettres, beaucoup de démarches !...



Mercredi, 19 avril.

Hier, les Russes ont pris Trébizonde. Ce succès va peut-être ranimer, dans l’esprit public, le rêve de Constantinople, dont personne ne parle plus.



Jeudi, 20 avril.

Selon l’usage, les ambassadeurs et ministres des Puissances catholiques sont conviés ce matin, en grande tenue, au Prieuré de Malte, pour entendre la messe du Jeudi saint.

Dans l’étroite église constellée de croix octogones, devant le trône du Grand-Maître et les inscriptions latines, je retrouve comme l’an dernier les souvenirs hétéroclites du tsar dément que fut l’empereur Paul.

Comme l’an dernier aussi, la pathétique liturgie qui se déroule devant moi ramène ma pensée vers les deuils de France, vers la foule innombrable, toujours croissante, de nos morts. L’histoire enregistra-t-elle jamais un pareil nécrologe ?... Plus spécialement, je songe à nos héros de Verdun qui, avec tant de simplicité, d’un cœur si ardent et si allègre, ont élevé jusqu’au sublime, jusqu’au prodige, les vertus séculaires de l’âme française.



Vendredi, 21 avril.

Cette année encore, les calendriers russe et grégorien coïncident pour la date de Pâques.

Vers la fin du jour, la princesse D..., qui est fort libre