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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/186

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reçu sa lettre, mais non pas son volume. Je ne sais à qui il l’a remis, mais je ne l’ai pas. Je ne veux lui répondre, comme à vous, qu’après l’avoir lu. J’en suis très curieux. Je crois l’histoire de la Gaule romaine à peu près inconnue.

« Adieu, mon cher ami. Mes respects, je vous prie, à Mme Thierry. Gardez-moi l’un et l’autre votre bon souvenir. J’y ai droit, car tenez pour certain qu’il n’y a pas de mémoire plus fidèle que la mienne. Rien n’y fait, ni l’absence, ni le temps, ni le silence. Adieu, tout à vous.

« GUIZOT. »


Bientôt, les Récits des Temps Mérovingiens allaient recevoir la plus haute consécration qu’il fût possible à l’Institut d’accorder à un ouvrage historique. Le 13 mai 1840, l’Académie française leur décernait le grand prix Gobert, comme au « morceau le plus éloquent d’histoire de France, » et proclamation solennelle de cette récompense était faite le 11 juin suivant dans la séance publique des cinq académies. Malgré la résistance de Viennet, fidèle à son esthétique périmée et scandalisé de trouver Hilpérik et Mérowig si différents de son Clovis, Mignet, au cours des échanges de vues préliminaires, avait surmonté toutes les hésitations.

Dans une lettre qu’il lui adresse quelques jours avant le vote, Augustin Thierry, remercie avec effusion son ami de cette intervention :


« Paris, 17 avril 1840.

« Mon cher Mignet,

« Je sais tout ce que vous avez été pour moi ; j’en suis vivement touché et je vous en aimerais davantage, si la chose était possible. Votre admirable intelligence des questions historiques et des conditions de l’histoire a gouverné tout le débat ; c’est elle qui a fixé le point de la question et rallié à quelque chose de ferme et de précis des idées vagues et des opinions divergentes. J’étais informé de tout cela presque jour par jour ; bien des fois j’ai été tenté de vous écrire, mais j’ai craint, en remerciant l’ami, de blesser la conscience du juge. Maintenant, je puis vous dire tout ce que j’ai dans le cœur, et je voudrais que ce fût de vive voix ; on ne s’exprime bien que comme cela. Hier l’envie m’a pris de me faire mener en voiture à votre