Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

capital qu’a la France à être indemnisée de ses dommages et ce n’est pas de parti pris qu’elle s’oppose à la réalisation de nos vœux ; elle a, au contraire, le désir sincère de nous aider. Mais la terrible crise de chômage à laquelle elle est en proie la précipite dans la recherche des remèdes empiriques. Elle a chez elle une remuante équipe d’économistes et de financiers, qui ont conçu l’ambition de ramener l’ordre dans le monde bouleversé. Les uns croient avoir la science infuse et, du haut de leur chaire, donnent des leçons à tous ceux qui, dans les autres pays, ne s’inclinent pas devant leurs oracles ; les autres ont l’habitude de brasser les idées comme des affaires, de les lancer comme des spéculations et de les abandonner, dès qu’ils voient qu’elles ne produisent rien. La plupart de ces gens, obsédés par le mal immédiat, ne cherchent qu’un résultat, relever le mark, de façon à enrayer la concurrence des exportations allemandes et à rouvrir les marchés du Reich aux marchandises anglaises. Pour eux, ne nous le dissimulons pas, nous ne sommes plus que des gêneurs. Pourquoi sommes-nous si exigeants ? Que n’offrons-nous une diminution de notre créance ? Que n’aidons-nous l’Allemagne à se relever ? Que ne lui tendons-nous la main ? Comment ne comprenons-nous pas que, si elle tombe, l’Europe entière ressentira le contre-coup de la catastrophe ? Et peu à peu, nous sommes ainsi conduits, après tant de concessions faites, à discuter encore des concessions nouvelles ; et nous avons à opter, définitivement peut-être, entre les sanctions et l’indulgence, comme si la seconde ne devait pas devenir de plus en plus dangereuse, comme si les premières ne risquaient pas d’être de plus en plus difficiles à imposer.

Il est pourtant, au moins, une sanction qui ne coûterait pas le plus petit effort. Elle n’aurait pas, peut-être, la valeur d’un gage très productif ; mais elle serait un sérieux moyen de coercition. Elle consisterait simplement à prévenir l’Allemagne que les délais d’évacuation des territoires occupés ne courent pas, puisque les obligations contractées par le Reich n’ont pas été remplies. Après la Conférence de Paris, M. Briand avait expressément déclaré aux Commissions parlementaires qu’il était d’accord, à cet endroit, avec nos alliés. Mais, jusqu’ici, cet accord ne s’est traduit par aucun écrit, ni même par aucune parole du Gouvernement britannique. Il semble, tout au contraire, que le désir d’abandonner le plus tôt possible la rive gauche se soit insinué dans l’esprit de nos alliés et que, sous prétexte d’alléger les charges de l’Allemagne et de lui donner un témoignage de confiance, assurément bien mérité, ils aient tendance