Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/325

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de son cabinet, en y faisant rentrer deux anciens grands- vizirs, le maréchal Izzet Pacha, ministre des Affaires étrangères, et Salih Pacha, ministre de la marine, qui passaient l’un et l’autre pour avoir quelque crédit à Angora, on crut que le moment approchait où, l’accord étant réalisé entre l’Europe et l’Asie, il deviendrait possible aux gouvernements alliés d’intervenir utilement, pour mettre fin au conflit gréco-turc et rétablir enfin la paix en Orient. Nul homme ne semblait plus propre à ce rôle de conciliateur, que le maréchal Izet, dont les nationalistes admiraient les talents militaires et les vertus civiques, et qui comptait parmi les dirigeants d’Angora des amis nombreux et dévoués : Ismet Pacha, le commandant en chef des armées de l’Ouest, avait été pendant la grande guerre son chef d’état-major.

La situation fut aussi difficile pour le nouveau cabinet que pour les précédents ; s’il faisait mine de se rapprocher du gouvernement nationaliste, il éveillait les soupçons des Alliés ; s’il paraissait marcher d’accord avec les Alliés, c’est aux défiances d’Angora qu’il était en butte. La double réserve qu’il était obligé de s’imposer lui rendait précisément impossible la tâche pour laquelle il semblait avoir été choisi. Voici assez exactement les conditions auxquelles le cabinet de Constantinople, à cette date, estimait que la paix pourrait être rétablie entre les grandes Puissances et l’Empire ottoman ;

Restitution de l’Asie-Mineure à la Turquie ;

Rectification de la frontière d’Europe, laissant à la Turquie la partie de la Thrace qu’elle est en droit de revendiquer pour des raisons ethnographiques, ou dont elle a besoin pour assurer la défense de Constantinople ;

Garde des détroits confiée à la Société des Nations, qui en autorisera ou en interdira souverainement le passage, après les avoir mis, par des fortifications appropriées, en état d’être défendus ;

Suppression des zones d’influence économique prévues par l’accord tripartite ;

Réformes judiciaires ayant un caractère temporaire et compatible avec la souveraineté de la Turquie ;

Droits des minorités définis et garantis, à l’égard de la Turquie, comme ils l’ont été à l’égard de l’Autriche, de la Hongrie et de la Bulgarie ;

Autorisation de recruter par conscription la totalité de