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catholicisme... Je ne vais pas parmi ces défenseurs en qualité de fidèle ou de croyant, je n’y vais même pas en invoquant le principe de liberté... Je rejoins et défends le catholicisme menacé, parce que je suis patriote, au nom de l’intérêt national.

Je considère que la nationalité française est liée étroitement au catholicisme, qu’elle s’est formée et développée dans une atmosphère catholique et qu’en essayant de détruire, d’arracher de la nation ce catholicisme, si étroitement lié avec toutes nos manières de sentir, vous ne pouvez pas prévoir tout ce que vous arracherez... [1]


Ce patriotisme prévoyant et généreux lui tenait les yeux constamment ouverts sur le péril extérieur. Il maintenait énergiquement contre les empiétements du germanisme les droits et la dignité de la communauté française ; il dénonçait les maladresses de ceux qui se montraient trop prompts à oublier [2] ; il signalait sans relâche les graves dangers de l’émigration dans l’Alsace-Lorraine annexée. Il écrivait : « Si les folies de nos Méridionaux, ce qu’à Dieu ne plaise ! devaient livrer à l’Allemagne une nouvelle bande de territoire, je ne quitterais pas ma Lorraine. Je demeurerais à Charmes pour être un élément de résistance française, de persistance latine et lorraine. Je supporterais de voir l’épais nuage des sauterelles affamées s’abattre sur mon plateau lorrain. Elles ne mangeraient tout de même pas ce que je couvrirais de terre ! » [3] En 1911, dans un moment particulièrement critique, appelé à Metz pour y commémorer les morts de 1870, il y prononçait un vibrant discours, fort audacieux dans sa discrète franchise, et qui dut faire sourciller plus d’un pangermaniste. Il y célébrait la constance de la fidélité lorraine et la profondeur de la tendresse française. « Vous savez qu’en France, déclarait-il, sur tous les sujets, nous sommes profondément divisés : c’est notre vieux défaut national ; c’est une maladie dont nous avons toujours souffert et dont nous nous sommes toujours guéris. Quand il y fallait un miracle, eh bien ! une jeune paysanne de Lorraine s’en chargeait. Vive la Lorraine ! C’est toujours elle qui rétablit l’unité française. S’il s’agit de vous, il n’y a plus qu’un sentiment,

  1. Discours à la Chambre, 21 décembre 1906.
  2. Le Voyage des trente et un maladroits ; Encore nos trente maladroits ; Réponse à un germanophile (Écho de Paris, 5 mai, 11 mai 1908, 24 février 1910), non recueillis en volume.
  3. Il ne faut plus émigrer (Éclair du 18 avril 1907), non recueilli en volume.