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pitié à vos regrets et je vous le répète : vous êtes un mal avisé. Maintenant, vous pouvez venir quand vous voudrez, mais avec la meilleure volonté du monde, je ne pourrai vous donner à exploiter une mine aussi riche de sensations et de renseignements : vous ne trouverez que des atlas, des livres et mon triste verbiage. Mme Bergeron vous boude, moi je vous abomine.

Tout à vous,


PÉRIOLAS.


VI
Périolas à Balzac.


(Saint-Cyr, 5 juin 1832.)

J’ai appris avec peine, mon cher Honoré, l’accident bien fâcheux qui vous retient au lit : votre lettre [1] me fait craindre que vous n’ayez quelque blessure à la tête, ce que je déplorerais de toute mon âme ; aussi, fou que vous êtes, pourquoi diable aller si vite, ou pourquoi songer à autre chose qu’à conduire gentiment la bête ? Sans doute vous n’étiez pas uniquement à votre affaire et je suis persuadé que votre chute est le triste résultat de quelque imprudence. Quoi qu’il en soit, je vous plains bien sincèrement et fais, faute de pouvoir faire mieux, des vœux ardents pour votre prompt et parfait rétablissement. Souvenez-vous que vous avez à votre disposition un moyen unique de vous conformer rigoureusement aux exigences médicales : c’est celui de venir à Saint-Cyr : ce n’est en effet qu’ici où vous pourrez trouver le calme plat qui vous serait si nécessaire pour mettre votre imagination en panne. Je voudrais que vous fussiez aussi pénétré de l’efficacité de ce moyen curatif que vous êtes convaincu, j’espère, du plaisir que j’aurais à vous recevoir et à vous donner des soins. La vigilante exactitude de Chapuis [2] ne m’a point étonné ; pour nous autres, vieux soldats, une promesse est aussi sacrée qu’une consigne, et il faut à tout prix que le service se fasse. Vous pouvez en toute occasion avoir recours à lui sans craindre de lasser son obligeance. J’ai reçu

  1. Lettre perdue.
  2. Le capitaine Chapuis, capitaine d’une des compagnies de Saint-Cyr et qui, à Waterloo, commandait une compagnie de grenadiers du 85e régiment.