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permettront l’emploi des gaz sur des zones d’une étendue telle qu’on ne peut l’imaginer.

« La fabrication des gaz est naturellement très vite réalisable, parce que toutes les usines de produits chimiques encore si nombreuses en Allemagne peuvent être réquisitionnées. Mais la fabrication des avions de guerre est plus lente.

« La défense contre le gaz semble plus difficile que contre les aéroplanes. Je pense que contre ceux ci l’artillerie anti-aérienne est susceptible de faire des progrès rapides et peut-être dans ce cas le gaz serait-il un des meilleurs moyens de défense, si avec des obus appropriés l’air peut être empoisonné autour des aéroplanes qui attaquent.il serait bien plus efficace de créer par exemple une sphère d’air toxique d’un kilomètre tout autour de l’aéroplane que d’essayer de le détruire directement avec les éclats d’obus. »

Ainsi qu’on le voit par ces textes, on est à peu près partout d’accord pour penser que la guerre future, — je n’ose écrire la guerre prochaine, — sera surtout une guerre chimique.

Une des causes de l’efficacité de l’arme chimique est, comme le remarque justement M. Kling, qu’elle introduit un facteur nouveau, qui n’entrait pour rien dans l’efficacité des armes antérieures : le facteur durée. L’éclatement d’un obus, le choc d’un projectile ou d’une arme blanche, la brûlure d’une flamme sont des phénomènes rapides presque instantanés dont l’efficacité très intense tombe immédiatement à zéro. Au contraire, beaucoup de produits chimiques répandus sur le terrain ou en suspension dans l’air ont une action plus ou moins durable et peuvent rendre longtemps intenable une zone étendue. Certains ont même une action retardée comme l’ypérite dont les brûlures ne se font généralement sentir que quelques heures après qu’elle est entrée en contact avec les téguments.

A ces divers points de vue, la gamme presque indéfinie des produits toxiques dont dispose l’armement chimique permet de doser à volonté à la fois l’intensité immédiate, la durée, les effets nocifs physiologiques qu’on veut obtenir selon le but tactique poursuivi.

Les produits lacrymogènes sont des produits dont les vapeurs diffusées dans l’atmosphère produisent à dose très faible des réactions douloureuses de l’œil qui aveuglent momentanément le sujet. Ils mettent hors de combat sans aucun accident durable.

Les produits suffocants dont le chlore est le type provoquent une irritation dangereuse des voies respiratoires avec suffocation, et entraînent souvent la mort par asphyxie.