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des jardins, 10, rue Taranne. La princesse prendra le premier et les combles. Chacun de nous deux aura son bail et sera complètement libre. Cette maison, qu’on remet à neuf, ne sera guère habitable pour moi avant le printemps prochain ; jusque-là et à partir d’octobre, il faut que je trouve un logement provisoire dans quelque maison meublée, ayant un jardin ou une cour, où je puisse me faire promener ; je m’occuperai de cette recherche dans le courant du mois prochain. Ce genre de souci et les tristes affaires nées de mon malheur sont à présent ma seule occupation. Plus tard, dès que j’aurai l’esprit un peu libre, je reprendrai ma tâche interrompue : cette introduction qui formera la tête d’un volume de 950 pages maintenant imprimé.

« Voilà bien des détails et une bien longue lettre ; je vous écris comme si je causais avec vous et sans songer que vous n’aurez pas le temps de me lire. Dites, je vous prie, à madame votre mère que, si la chose était possible, je me ferais transporter auprès d’elle, pour lui demander le secours de sa parole et de ses conseils et me fortifier par l’exemple d’une âme si haute et si résignée. Dites-lui qu’elle est au premier rang des personnes que je vénère et que j’admire et recommandez-moi à son souvenir et à ses prières. Je sais que vos enfants, sans me connaître, ont pensé à moi avec sympathie. Je voudrais pouvoir les en remercier.

« Adieu, mon cher ami, rappelez-vous quelquefois nos anciens jours, ces jours où nous espérions ensemble, et qui ont été suivis pour vous de tant d’honneurs et de tant de souffrances. J’y remonte souvent dans mes rêveries et je trouve là près de vous, pleine de grâce et de bonté pour moi, celle qui fut le charme de votre vie et qui, en partant de ce monde, vous a laissé au cœur un deuil éternel. C’est en son nom que je vous demanderai du secours dans mes défaillances, à vous qui avez pleuré et qui, au milieu des larmes, avez su rester fort et poursuivre noblement le travail qui vous est assigné ici-bas. Adieu, encore une fois, et croyez pour la vie à mes sentiments de tendre amitié et d’admiration. »


Pour trouver ce « logement provisoire » dont nous le voyons préoccupé, Augustin Thierry recourut à l’obligeance de ses amis.

Vainement le docteur Graugnard, Ary Scheffer, Amédée Thierry s’employèrent à battre le faubourg Saint-Germain sans rien découvrir. Cédant à ses instances réitérées, force fut donc à