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dont le labeur dépasse fréquemment, et comme durée et comme intensité, la commune mesure. La conservation de ces individus importe autant à la nation que celle des autres. Cependant le législateur les ignore, de même qu’il laisse libres ceux qui travaillent isolément, en famille ou avec un petit nombre d’ouvriers.

On argue de la nécessité de protéger l’homme dénué de ressources, qui est obligé de conquérir chaque jour son salaire en luttant contre les exigences de celui qui détient le capital. Mais, dans le monde moderne, le travailleur, sans lequel aucune entreprise ne peut vivre, est dans une position de plus en plus forte : il a à sa disposition la puissance de l’association. Partout nous avons vu s’organiser des groupements d’ouvriers qui défendent leurs intérêts. Ne sont-ils pas de taille à discuter et à obtenir satisfaction ? De leur côté, l’Etat et les municipalités peuvent intervenir en vertu de leurs droits de police et s’assurer, notamment au point de vue de l’hygiène, que les prescriptions sanitaires sont observées.

Il est à remarquer que l’article 427 du Traité de Versailles ne parle que des communautés « industrielles « et ne mentionne en aucune façon le travail agricole, auquel on a voulu étendre les projets de réglementation internationale.

Nous examinerons l’état actuel de la législation française, l’effet qu’elle a eu sur un certain nombre d’industries. Nous jetterons ensuite un coup d’œil sur les principales législations étrangères. Nous terminerons en exposant les desiderata qui se font jour à l’heure actuelle au point de vue de l’abrogation, de la suspension ou de la modification de la loi de huit heures.


II. — LÉGISLATION FRANÇAISE

Sans attendre la réunion d’une conférence internationale, appliquant chez elle les principes qu’elle faisait inscrire dans le Traité de Versailles, la France établit, par la loi du 23 avril 1919, la journée de huit heures. Cette réforme a été opérée par une modification du titre Ier du livre II du Code du travail : elle s’est traduite par le texte suivant : « Dans les établissements industriels ou commerciaux ou dans leurs dépendances, de quelque nature qu’ils soient, publics ou privés, laïques ou religieux, même s’ils ont un caractère d’enseignement