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que de longs siècles ont élevées, il est d’autant plus près de notre cœur de Père qu’il est plus malheureux. L’immensité de la ruine est telle que tous les peuples doivent s’unir pour y remédier... Notre appel s’adresse avant tout aux peuples chrétiens, qui connaissent l’infinie charité du Divin Rédempteur qui a donné son sang pour nous rendre tous frères. Il s’adresse aussi aux autres peuples civilisés parce que tout homme digne de ce nom doit sentir le devoir d’accourir là où meurt un autre homme. » [1] Je ne crois pas que jamais Benoit XV ait été plus éloquent que dans ce message où il implorait toute l’humanité pour un peuple qui avait faim. La Société des Nations, dans le texte même des résolutions qu’elle prit pour la lutte contre la famine, inséra le témoignage de sa « haute et respectueuse considération » pour le Pape Benoît XV et de sa reconnaissance la plus sincère pour la « généreuse initiative » du Pontife, » qui prouve, une fois encore, la sollicitude avec laquelle Sa Sainteté tient à soulager toutes les souffrances ; » et elle chargea son président de transmettre à Benoît XV copie de ces décisions. Une fois encore, les objections d’ordre diplomatique, derrière lesquelles se retranchaient certaines attitudes de réserve à l’endroit de la papauté, finissaient par s’atténuer et par capituler : on aurait rougi d’opposer au Pontife, lorsqu’il frappait, avec une douloureuse instance, à la porte des cœurs humains, je ne sais quels ergotages de chancellerie, et je ne sais quelles chicanes sur le caractère spécial de sa souveraineté. Le Pape Benoit XV, au moment où il allait descendre dans la tombe, était devenu l’interlocuteur de la Société des Nations, — un interlocuteur dont elle aimait l’esprit d’humanité : c’était un indispensable début, pour des relations qui deviendront peut-être, un jour, moins lointaines et plus fécondes.


III. — LA NAISSANCE D’UNE INTERNATIONALE CHRÉTIENNE OUVRIÈRE.
LA RÉSURRECTION DE DEUX PEUPLES CATHOLIQUES

Tribunes diplomatiques, antichambres du Vatican, sont assurément des endroits propices pour mesurer l’ascendant d’une souveraineté : mais au delà de ces tribunes, au delà de ces antichambres, un pape de 1922, qui jette son regard sur la carte du monde, trouve d’autres motifs de se réjouir.

  1. Nouvelles religieuses, 1er septembre et 1er décembre 1921, p. 387 et 531.