Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/805

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec le pays et la Douma. Or ce n’est pas la tendance qui prévaut, en ce moment...

Il a été frappé de l’importance extrême que l’opinion française attache à l’intervention de la Roumanie ; il n’a qu’une confiance médiocre dans la valeur de l’armée roumaine ; il laisse percer, une fois de plus, sa vieille sympathie, son inépuisable indulgence pour les Bulgares.

Désirant l’interroger plus à fond sur la situation intérieure qui me préoccupe grandement, je l’invite à dîner, dans trois jours, avec Chingarew.

Wiélopolski me prend alors à part et me dit en confidence :

— Je sais, avec certitude, que l’Empereur convoquera prochainement ses ministres à Mohilew pour résoudre enfin la question de l’autonomie polonaise. Sturmer et la plupart de ses collègues y sont plus opposés que jamais. Néanmoins, je crois que Sazonow a chance de l’emporter : car c’est lui qui a pris décidément l’affaire en main : il a trouvé d’ailleurs chez le général Alexéïew un appui énergique.

Il ajoute qu’il a une occasion indirecte de faire bientôt passer une lettre sous les yeux de l’Empereur et qu’il voudrait y glisser une appréciation de moi. Je lui réponds :

— Vous pouvez dire, de ma part, que la proclamation de l’autonomie polonaise serait accueillie en France, non seulement comme le premier acte de réparation historique qui sera sorti de cette guerre, mais comme un acte éminemment politique, d’une portée considérable pour l’avenir, et qui peut faciliter singulièrement l’avance des armées russes en Pologne.


Les nouvelles de Galicie et de Bukovine continuent d’être excellentes. Le total des prisonniers s’élève maintenant à 233 000.

En France, l’offensive sur la Somme est extrêmement dure ; mais elle tourne à notre avantage.



Mercredi, 5 juillet.

Le général Polivanow vient déjeuner en tête-à-tête avec moi.

Malgré sa disgrâce, il est resté en relations intimes avec le général Alexéïew, qui l’apprécie hautement. Il est donc qualifié pour juger avec compétence la situation stratégique des armées russes. Tout en affirmant qu’il ne parle qu’à titre personnel, il me dit :