que par un motu proprio de l’Empereur, par un coup d’État de la volonté souveraine. On m’assure que c’est l’idée de Sazonow et qu’il l’a déjà même insinuée à l’Empereur ; mais il a contre lui Sturmer et toute « la Cour de Postdam, » qui voient très habilement, dans la question polonaise, le meilleur thème de réconciliation avec l’Allemagne.
Samedi, 4 mars.
Cet après-midi, j’ai une longue conversation avec Philippesco, qui me reçoit à la Légation de Roumanie, n’ayant pu venir à l’Ambassade, car il est encore souffrant.
Malgré sa fatigue physique, il a une ardeur de conviction, une chaleur d’accent qui se manifestent dès les premiers mots.
Après avoir spécifié qu’il n’est investi d’aucune mission et qu’il voyage en simple particulier désireux de se renseigner, il me dit :
— Vous connaissez mes sentiments pour la France ; c’est ma seconde patrie. Vous savez aussi comme je suis impatient de voir notre armée entrer en campagne. Vous n’ignorez pas enfin que je ne suis pas un ami politique de notre Président du Conseil et qu’il me compte plutôt parmi ses adversaires. Mais je ne vous cacherai pas que j’approuve M. Bratiano de ne pas vouloir lancer notre pays dans la guerre avant que l’heure de l’offensive générale ait sonné pour les Alliés et qu’une armée russe soit prête à entrer en Dobroudja. Cette expédition d’une armée russe au Sud du Danube ne nous est pas seulement indispensable au point de vue stratégique ; nous en avons encore besoin pour rendre définitive, irréparable, la rupture entre la Russie et les Bulgares. Aussitôt que ces conditions seront réalisées, nous entrerons en Transylvanie. Mais je doute que le Gouvernement et l’État-major russes se rangent à nos idées.
Je lui réponds, sur un ton de fermeté :
— Je n’ai aucun motif de présumer que l’État-major russe ne consentirait pas à expédier une armée dans la Dobroudja. Quant à la question de savoir si un contingent roumain devrait ou non appuyer les mouvements de cette armée, c’est un détail qui serait réglé par le plan d’opérations. En tout cas, ne croyez pas que le Gouvernement russe cherche à ménager les Bulgares. La Russie est une alliée loyale. Tant que les armées