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Leur idéal, plus intérieur, rejoint d’ailleurs sur tous les points essentiels celui des soldats catholiques : ils insistent particulièrement sur la nécessité du retour de l’Alsace-Lorraine à la France, sur l’évidente, l’absolue justice de la cause française. « On ne m’envoie pas me faire tuer, écrit magnifiquement l’un d’eux ; je vais combattre, j’offre ma vie pour les générations futures. Je ne meurs pas, je change d’affectation. Celui qui marche devant nous est assez grand pour que nous ne le perdions pas de vue. » Quant aux israélites, croyants ou incroyants, préoccupés qu’ils sont, pour la plupart, de montrer qu’ils sont dignes d’appartenir à la communauté française, ils justifient par leur vaillance l’idéalisme qu’ils ont hérité de leur race.

On aurait pu craindre que le pacifisme et l’internationalisme des socialistes ne leur fussent un obstacle à la claire intelligence du grand drame où se sont jouées les destinées nationales ; et, de fait, il s’est bien trouvé quelques pèlerins de Zimmerwald et de Kienthal pour pousser à la paix blanche et pour prêcher la réconciliation universelle. Mais l’ensemble du parti, violemment déçu par la trahison de la social-démocratie, profondément convaincu que l’avenir des classes laborieuses était étroitement lié à la victoire française, s’est levé en masse contre l’impérialisme germanique et, pour faire « la guerre à la guerre, » s’est bravement astreint à la stricte discipline qu’il répudiait si follement naguère. Ainsi transformé, l’idéal socialiste a inspiré de très nobles sacrifices et légitimé des actes du plus pur patriotisme. En face des socialistes se dressaient, avant 1914, avec une intransigeante âpreté, ceux qui s’appelaient eux-mêmes les traditionalistes. Avant de libérer la patrie, ils eurent à se libérer eux-mêmes. » Ces vainqueurs de la Marne avaient premièrement, au fond de leur conscience, vaincu la Germanie, dégagé les vertus et les vérités de chez nous, bref, assuré en eux le triomphe de la France... Tous prévoyaient et annonçaient la guerre. » Ils n’eurent qu’à se souvenir du passé pour le continuer ; mais ils l’ont fait avec une générosité admirable ; et le nombre de leurs morts prouve assez le sérieux tragique avec lequel ils ont voulu rendre témoignage à leurs doctrines.

Rendre témoignage : sur ce point ils sont tous d’accord, les soldats de notre France. « Un trait commun à ces diverses familles d’esprit durant cette guerre, — dit fort bien M. Barrès, — c’est qu’elles sentent toutes que le meilleur, le plus haut