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de nos colonies lointaines. N’a-t-on pas vu la viande frigorifiée de Madagascar être avantageusement concurrencée par celle de l’Argentine, et nos bois de la côte d’Ivoire prendre surtout le chemin de Hambourg ?


Si notre domaine africain constitue le plus grand réservoir de nos ressources d’outre-mer, il offre aussi l’avantage d’être le seul avec lequel, en temps de guerre, nous puissions avoir la certitude de rester en liaison.

Compter, en effet, sur la maîtrise de l’Océan paraît, pour longtemps encore, bien au-dessus de nos propres moyens. En revanche, il nous suffirait de le vouloir, c’est-à-dire d’organiser une flotte méditerranéenne convenablement aménagée et outillée, par conséquent composée en grande partie de croiseurs rapides, torpilleurs, sous-marins et hydravions, pour conserver, quoi qu’il arrive, la liberté de nos communications dans la partie de la Méditerranée occidentale qui sépare les rives de France de celles de l’Afrique du Nord.

Mais l’Afrique du Nord n’est qu’une partie de notre Empire africain, non la plus étendue, mais jusqu’ici la plus riche parce que, pourvue de nombreux cadres européens et d’un réseau ferré à peu près suffisant, elle a pu, sur les deux tiers de ses surfaces cultivables, être mise en valeur.

Au delà du Sahara, qui n’est pas du tout la mer de sable que beaucoup trop de Français imaginent, s’ouvrent ces larges et longues vallées du Sénégal et du Niger, de l’Oubangui et du Chari, ces vastes plaines du Tchad, ces « Indes Noires, » comme les a dénommées E.-M. de Vogué, qui contiennent en puissance, mais par notre faute encore en sommeil, d’inépuisables ressources en hommes, en troupeaux, en matières premières et en produits textiles ou alimentaires de toute sorte : richesses insoupçonnées auxquelles il ne manque, pour éclore, que les voies de pénétration et d’évacuation qui leur apporteraient le mouvement, la circulation, la vie.

Les bords de cet immense Empire, les rivages du Sénégal, de la Guinée, de la Côte d’Ivoire, du Dahomey, du Cameroun et du Gabon, sont plus ou moins mis en valeur, parce que plus ou moins pénétrés par le rail ; mais ces bords s’ouvrent sur l’Océan. En temps de paix, ils sont séparés de la métropole par