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marais pestilentiels de la Mitidja, et faire, de cette contrée que le maréchal Clauzel appelait alors « l’infecte Mitidja, » l’un des plus splendides domaines de culture qu’il soit possible d’imaginer ; c’est à cette belle et vigoureuse race des colons algériens qu’il faudra s’adresser pour mettre en valeur l’Afrique centrale.

Tandis, en effet, qu’en France, même en supposant qu’on réussisse à remonter la funeste pente où nous sommes engagés, la natalité semble destinée à rester stationnaire, en Algérie, grâce à l’incessant afflux des immigrants Espagnols, Italiens, Siciliens, Maltais, dont les fils, par le jeu automatique de la loi de 1889, se font ou se laissent naturaliser Français, il se fonde une race nouvelle, franco-algérienne ou franco-latine, jeune, énergique, entreprenante, et qui a doublé en moins de vingt ans. C’est à cette greffe française, à ce centre d’essaimage français, qu’il faudra faire appel pour procurer à notre Afrique centrale les cadres, l’ossature dont elle a tant besoin.

On ne connaît pas assez, en France, le grand rôle que l’Algérie peut jouer dans nos destinées.

L’Etat n’accorde pas un intérêt suffisant à cette « colonisation officielle » qui a fait sa grandeur et sa force, et qui seule pourra réaliser l’œuvre d’intensification du peuplement français nécessaire pour assimiler le nombre toujours croissant des immigrants étrangers, et pour favoriser le débordement sur l’Afrique centrale, lorsque sera construit le Transsaharien.

Une évolution caractéristique parait d’ailleurs devoir faciliter et provoquer même cette future émigration. Par un contraste assez inquiétant, la colonisation agricole de l’Algérie semble entrer en régression, au moment même où la natalité s’accroit. A la suite des larges vides qu’a creusés la guerre chez les colons, et aussi, il faut bien le dire, de certaines réformes politiques un peu trop hâtives qui les ont mécontentés ou menacés dans leur sécurité, beaucoup de terres ont été rachetées par les indigènes dont la population ne cesse d’augmenter et que la guerre a enrichis. Ces terres sont devenues en partie incultes.

Les surfaces cultivées qui avaient atteint leur maximum en 1914, en dépassant 3 millions d’hectares, ne représentent plus aujourd’hui que 2 200 000 hectares.

En revanche, malgré les pertes subies pendant la guerre et au cours des deux désastreuses années sèches 1919-1920, la population qui était de 2 700 000 âmes en 1871, est de 5 250 000