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Les nuances.

La respiration.

La prononciation.

Le chef d’orchestre.

Comme dit Leporello, « il catalogo è questo, » et chacun des « chefs » ci-dessus énumérés mériterait au moins un paragraphe. Chacun fournit jadis un chapitre à Gounod, à la fin de son petit livre : « Le Don Juan de Mozart » [1]. Au début on lisait ceci : « Don Juan est populaire, indiscuté, consacré à jamais. Est-il compris ? » Pas toujours, la dernière reprise vient de le prouver. Gounod ajoutait : « Je le dédie » (ce livre), » je le dédie surtout aux jeunes compositeurs et aux interprètes de Don Juan. » Et encore : « Je n’ai point l’intention de donner ici de leçon à qui que ce soit. » Pourquoi donc ? Aussi bien, le livre en donne plus d’une, en tout genre, que les interprètes, et que chacun de nous peut recevoir et ferait bien de méditer. Leçons d’ordre technique ; leçons aussi d’ordre en quelque sorte moral, qui font de l’ouvrage un essai de psychologie musicale, l’analyse, — à propos d’un chef-d’œuvre et dans le chef-d’œuvre même, — de ce qu’un psychologue musicien, Charles Lévêque, appelait le rapport entre les forces du son et celles de l’ame. Puisqu’il s’agit de Mozart, nous ne dirons pas seulement les forces, mais les grâces, toutes les grâces, celles de l’esprit et celles du cœur.

Pas une page, pas une phrase, pas une note même de Don Juan n’était étrangère à Gounod. Il tirait d’un fragment une vue d’ensemble, une loi générale, une de celles au moins qui régissent le génie de Mozart.

Ceci, par exemple, à propos de l’air de Zerline : « Batti, batti. » « Les seize premières mesures établissent tout d’abord la forme mélodique du morceau avec cette tranquillité tonale qui révèle la sécurité de l’inspiration et qui, de plus, est un véritable enchantement pour l’oreille et pour l’esprit de l’auditeur. C’est, le plus souvent, l’absence ou l’insuffisance de l’idée qui entraîne à l’abus des modulations si fréquent dans une foule de compositions modernes. On redoute l’unité tonale comme une pauvreté et l’on se jette dans des divagations harmoniques sans fin dont l’inévitable résultat est la plus fatigante monotonie. »

Voilà sans doute une première leçon pour certains. Et peut-être en voici, pour d’autres, une seconde : « Mozart donne à ses personnages

  1. 1 vol. ; Paul Ollendorff, 1890.