Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/965

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

A côté de l’Angleterre, les États-Unis sont encore en partie dans l’expectative. Cependant une nouvelle loi y est en préparation pour rendre le système métrique décimal seul système légal.

Telle est le bilan des progrès politiques, — si j’ose ainsi parler, — du système métrique.

Au point de vue purement technique, diverses choses intéressantes sont à signaler.

On sait depuis quelques années que le mètre, ou plutôt l’étalon métallique réalisé par les savants de la Révolution conservé aux Archives nationales et dont la copie gardée au Pavillon de Breteuil sert de prototype, est un peu plus court que la dix-millionième partie da quart du méridien terrestre. Cela résulte des mesures goédésiques les plus récentes. La différence est faible, puisque le prototype n’est trop court que d’environ un cinquième de millimètre. La politesse de cette différence fait honneur à l’exactitude des mesures des géodésiens du dix-huitième siècle, mais enfin elle est réelle. Elle est telle que si le mètre est défini de la façon qu’avait fait la Convention, un acheteur de 5 000 mètres de drap n’en reçoit en réalité que 4 999. Il aurait le droit, légitimement, de se dire volé. Je ne sais plus quel humoriste a eu l’idée de calculer quelle somme représentait pour les consommateurs français l’erreur ainsi commise à leur détriment depuis qu’on leur vend des marchandises métrées. Il a trouvé un nombre fantastique de milliards, plus que l’Allemagne ne nous en doit

Il y a d’ailleurs à cela une compensation, car des déterminations faites naguère avec une haute précision ont montré que le prototype métallique du kilogramme, qui sert depuis la Révolution à la fabrication des poids commerciaux, est de 27 milligrammes plus lourd que le kilogramme théorique de la Convention défini comme étant la masse d’un décimètre cube d’eau au maximum de densité. Si donc le consommateur a été lésé pour ce qui se mètre, il a été beaucoup trop généreusement servi pour ce qui concerne toute la marchandise pesée. C’est une belle compensation.

La vérité est que tout ceci ne peut être qu’un paradoxe humoristique, pour deux raisons. D’abord les mesures dans la pratique commerciale ne se font pour ainsi dire jamais avec une précision atteignant le cinq-millième pour les longueurs et le trois-millionième pour les poids, quantités qui représentent les écarts des étalons révolutionnaires par rapport à leur définition théorique. Ensuite et surtout, il y a longtemps que le mètre et le kilogramme ont cessé d’être définis