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5 janvier.

Par une touchante pensée, une halte a été prévue à Ba-Dinh sur la route de Vinh à Hanoï. C’est un groupe de trois villages célèbres par le siège qui en fut fait en janvier 1887 et auquel a pris part le capitaine du génie Joffre, chargé des travaux de siège.

La cérémonie a été très simple : nous arrivons à Ba-Dinh par une longue chaussée élevée au milieu d’une immense plaine inondée : tel se présentait le champ de bataille, il y a trente-cinq ans, au futur Maréchal. À la porte de la Pagode, toutes les autorités françaises et indigènes sont groupées : il y a là plus de 200 Annamites décorés de la croix de guerre, des missionnaires, des montagnards sauvages, les Muongs, venus de plus de 80 kilomètres, enfin, deux ou trois vieux indigènes décorés de la médaille militaire : ce sont les seuls survivants de cette époque lointaine qu’on ait pu retrouver ; l’un d’eux est un ancien sapeur du Maréchal cité à l’ordre de l’armée sur le même ordre du jour que son illustre capitaine.

Un dialogue s’engage : « Reconnais-tu ton capitaine ? — Oui, mais il avait de la barbe et il était rouge. » Puis un joli discours du résident supérieur, Pasquier, qui s’excuse de troubler le silencieux colloque qui s’établit sans doute entre le jeune capitaine de Ba-Dinh et le premier maréchal de France, et c’est tout : le cortège d’autos se reforme qui nous ramènera coucher à Thanh-Iloa.


Hanoï, 7 janvier.

Le Maréchal est arrivé hier après-midi à Hanoï par la gare monumentale somptueusement décorée. Une foule énorme l’attendait pour l’acclamer sur tout son passage jusqu’au Gouvernement général ; il est clair qu’Hanoï n’a pas voulu être distancé dans l’enthousiasme par sa rivale Saïgon.

Les fêtes sont ici les répliques de celles de Saïgon : cortèges, illuminations, réceptions des corps et services, des délégations indigènes, des anciens combattants, revue des troupes, dîners officiels, bal… Mais au milieu de toutes ces manifestations, le Maréchal a trouvé le temps de faire ce soir une visite que son cœur attendait depuis longtemps.

Une chambre sombre encombrée de livres d’études et du triste mobilier des cellules de moines ; dans un coin, une statue