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Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 13.djvu/356

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Un mot, Cara, pour la déception que vous croyez que je préparais à mon parti. Mille fois non. Tout ce que je veux faire sera imprimé, proclamé, connu avant toute chose. Je ne veux jamais tromper personne, pas même une femme. Tout dol est un crime.

Readieu. A propos, mon libraire me parle d’une quatrième édition instante des Romans et contes philosophiques. J’en aurai des exemplaires, et j’espère en offrir un au commissaire, auquel je voudrais bien prouver une chose dont il doute, c’est que, opinion et conviction politique à part, je suis bonhomme et point moqueur. Je ne fais de l’aristocratie qu’avec les masses, et c’est un jeu assez dangereux pour être noble, puis en amour, où la femme ne saurait trop l’être, et vous l’êtes-vous, Mme Zulma, si coquettement mise, si fémininement recherchée.

Vous avez gagné ! Il n’y a pas une ligne d’écrite sur la Bataille. Mais j’en ai tant livré !

Adieu. Un baiser tendre sur vos mains douces et parfumées. Je voudrais bien vous rapporter quelque chose de joli de Genève.

HONORÉ.


A Genève, Balzac et Mme de Castries se séparèrent et le romancier vint chercher la calme retraite qui lui était nécessaire auprès de Mme de Berny dans le petit pavillon de La Bouleaunière, près Nemours. Mais il ne pouvait s’y attarder et Mme Carraud lui offrit aussitôt le paisible asile de son foyer, à la Poudrerie


16 octobre 1832.

Ne vivrez-vous donc jamais tranquille, pauvre Honoré ! N’avez-vous pas assez des agitations de votre vie d’artiste, de votre complexion d’artiste, sans que la vie matérielle vienne y mêler les siennes ! Pauvre, pauvre Honoré ! Oui, venez ici vous rafraîchir au contact d’une bonne et bien tendre amitié ; vous serez tranquille et à distance, sinon à l’abri, de toute tracasserie. Vous y aurez peu de distractions, et de bien vulgaires. Ce qui en moi répond aux besoins recherchés de votre esprit est trop vague, trop peu arrêté, pour vous être de quelque secours. Mais si vous me donnez l’hiver, vous ne sentirez aucun frottement dans cette vie animale qu’il vous faut subir comme le crétin.

Je vous adopte comme fils, et prendrai le gouvernement de tout cela. Auguste Borget, qui est ici et va partir pour le Berry,