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lippe le Bel au sujet du séquestre de leurs biens, séquestre qui fut une suite de la captivité des chevaliers. Les historiens qui ont travaillé sur les textes publiés et mal datés par Baluze et par Dupuy n’ont trouvé que confusion, et ces documents sont restés comme une lettre morte ; nous espérons, en leur rendant leur véritable date, en tirer une vive lumière.


II


Que Philippe ait vu avec plaisir l’élection de Clément V, cela n’est pas douteux ; et que la majorité du Sacré-Collége, en le choisissant pour Pape, ait voulu plaire au roi de France, cela n’est pas moins certain. C’est ce que prouve une lettre adressée par le cardinal Napoléon des Ursins à Philippe en 1314, après la mort de Clément. Napoléon était entièrement dévoué à la France, il s’exprime ainsi : « Nous nous rappelons que nous avons été onze mois en prison à Pérouse (lors du conclave pour l’élection du successeur de Benoît XI) et Dieu seul sait quelles souffrances du corps et quelles angoisses de l’âme nous y avons endurées. J’ai abandonné ma maison pour avoir un Pape français, car je désirais l’avantage du roi et du royaume, et j’espérais que celui qui suivrait les conseils du roi gouvernerait sagement Rome et l’univers et réformerait l’Église[1]. » Voilà qui est clair ; mais cette attente fut déçue. Le cardinal poursuit en ces termes : « C’est pour cela qu’après avoir pris toutes précautions, nous choisîmes le feu Pape, persuadés que nous avions fait le plus magnifique présent au roi et à la France. Mais, ô douleur ! notre allégresse se changea en deuil, car si l’on pèse les œuvres du défunt, par rapport au roi et au royaume,

  1. « Meminimus nos sex mensibus fuisse in carcere Perusii, in quo solus Deus novit cum quantis periculis corporibus et sollicitudinibus cordis extitit laboratum ; et reliqui domum meam solito, ut possem habere pontificem de regno, cupiens regi et regno esse provisum, et sperans quod quicumque regis sequeretur consilium, orbem et urbem bene regeret. Et quoniam cum multis cautelis quibus potuimus hunc qui decessit elegimus, per quem credebamus regnum et regem magnifice exaltasse. Sed, pro dolor, versa est in luctum cithara nostra. » Napoleonis de Ursinis cardinalis Epistola ad Philippum regem Francorum de statu romanæ ecclesiæ post obitum Clementis V. Bibl. Nat., no 4991. — Baluze, Vitæ Paparum Avenionensium, t. II, pages 289 et suiv.