du ciel, et leur poitrine plongeait dans les enfers. Leur seul aspect était foudroyant, et leur regard mortel ; leur éclat puissant renversait les montagnes... Il eut été bien osé celui qui se serait aventuré dans ces sinistres parages et aurait essayé de franchir le seuil défendu par des gardiens aussi vigilants [1].
À leur vue, Gilgamès se sentit d’abord glacé d’effroi. Son visage devint noir de peur... Toutefois, s’étant rassuré et prenant une résolution courageuse, il alla droit à leur rencontre : « Quel est donc celui qui vient vers nous ? » dit l’homme-scorpion à sa femme, « on dirait un dieu... » — « Dieu et homme à la fois, » reprit la femme. A peine finissaient-ils de parler, que Gilgamès les aborda. Or, comme le monstre s’étonna et demandait le motif qui avait amené jusqu’à lui, à travers des routes impraticables, ce voyageur audacieux, celui-ci lui répondit tout uniment qu’il allait au devant de Samas-napistim, son aïeul, de celui qui avait été admis dans la vaste assemblée des dieux, qui possédait le secret de la vie et de la mort [2].
L’homme-scorpion essaya d’abord de dissuader Gilgamès d’une aussi folle entreprise. Il lui montra les difficultés et les périls de la route. Il n’y avait aucune voie tracée ; personne d’ailleurs, de temps immémorial, n’avait dépassé ces monts. Il fallait aller, vingt-quatre heures durant, à travers la région de la nuit... Le plus sage était évidemment de s’en retourner [3].
Le héros insista ; il pria et pleura tant, que le monstre finit par lui indiquer le chemin, et lui ouvrir la porte qui donnait accès dans les ténèbres [4].