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était moins digne de l’exercer. Ce bel épisode de sa vie lui ramena les amis qu’avaient écartés si injustement son attitude lors de l’article 7. Les nationalistes, assez honteux d’ailleurs du naufrage Boulangiste, ne lui en voulurent pas.

Pouvait-on, désormais, en vouloir à Jules Simon ? Il était devenu le chef incontesté d’un ministère qui n’a point d’existence légale et qui n’en est pas moins l’un des plus féconds et des plus nécessaires que puisse créer une grande démocratie. Il était devenu le ministre des entreprises humanitaires. Innombrables étaient les sociétés qu’il présidait, auxquelles il apportait une direction sage, de précieux encouragements et un prestige sans égal. L’Association philotechnique dont les cours du soir ont permis à tant de travailleurs adultes de refaire l’éducation intellectuelle qui avait manqué à leur enfance, l’Alliance française, cette vaste association qui répand au loin la pratique et le culte de notre langue, l’Union des sports athlétiques consacrée à la diffusion bienfaisante des exercices physiques, les Habitations à bon marché vouées au bien-être de l’ouvrier et à la protection de son foyer, la Société d’encouragement au bien qui va chercher pour les récompenser les humbles héros du devoir quotidien, l’Hospitalité de nuit qui fournit un gîte aux désespérés de la vie, l’Office central des institutions charitables qui vise à faciliter en leur servant de lien la tâche des sociétés de bienfaisance, l’Assistance par le travail dont le but est de relever le miséreux en le secourant, le Patronage des libérés qui aide le condamné à se réhabiliter devant le monde après que sa peine a pris fin, la Ligue contre la licence des rues qui poursuit l’ignoble pornographie, le Sauvetage des naufragés, la Ligue anti-esclavagiste, enfin, le Sauvetage de l’enfance, l’œuvre qui, peut-être, était le plus sienne et lui tenait le plus à cœur, voilà quelques-unes — quelques-unes seulement — des grandes entreprises auxquelles Jules Simon voua son temps et son talent pendant les douze dernières années de sa vie. On conçoit que se sentant si utile, il n’eut plus le désir de rentrer dans la politique.

Ces occupations, ce dévouement admirable et la compétence qui en résultait désignaient Jules Simon tout autant que ses livres et sa renommée universelle pour représenter la France à la conférence ouvrière de Berlin, convoquée par l’empereur Guillaume ii. Il y concentra naturellement tous les regards ; il fut le véritable président de cette réunion mémorable dans laquelle se trou-