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fices réalisés par chaque industrie, une somme au moyen de laquelle l’état pourrait venir en aide à toute industrie que des circonstances imprévues et extraordinaires mettraient en souffrance. Au surplus, dans le système que nous proposons, les crises seraient bien plus rares. D’où naissent-elles aujourd’hui en grande partie ? Du combat vraiment atroce que se livrent tous les intérêts, combat qui ne peut faire des vainqueurs sans faire des vaincus, et qui, comme tous les combats, attela des esclaves au char des triomphateurs. En tuant la concurrence, on étoufferait les maux qu’elle enfante. Plus de victoires, donc plus de défaites. Les crises, dès lors, ne pourraient plus venir que du dehors. C’est à celles-là seulement qu’il deviendrait nécessaire de parer. Les traités de paix et d’alliance ne suffiraient pas pour cela sans doute ; cependant, que de désastres conjurés, si, à cette diplomatie honteuse, lutte d’hypocrisies, de mensonges, de bassesses, ayant pour but le partage des peuples entre quelques brigands heureux, on substituait un système d’alliance fondé sur les nécessités de l’industrie et les convenances réciproques des travailleurs dans toutes les parties du monde ! Mais notons que ce nouveau genre de diplomatie sera impraticable aussi longtemps que durera l’anarchie industrielle qui nous dévore. Il n’y a que trop paru dans les enquêtes ouvertes depuis quelques années. À quel désolant spectacle n’avons-nous pas assisté ? Ces enquêtes ne nous ont-elles pas montré les colons s’armant contre les fabricants de sucre de betterave, les mécaniciens contre les maîtres de forges, les ports contre les fabriques intérieures, Bordeaux contre Paris, le Midi contre le Nord : tous ceux qui produisent contre tous ceux qui consomment ? Au sein de ce monstrueux désordre, que peut faire un gouvernement ? Ce que les uns réclament avec instance, les autres le repoussent avec fureur : ce qui rendrait la vie à ceux-ci donne la mort à ceux-là. Il est clair que celle absence de solidarité entre les intérêts rend, de la part de l’État, toute prévoyance impossible et l’enchaîne dans tous ses rapports avec les puissances étrangères. Des soldats au dehors, des gendarmes au dedans, l’État aujourd’hui ne saurait avoir d’autres moyens d’action, et toute son utilité se réduit nécessairement à empêcher la destruction d’un côté en détruisant de l’autre. Que l’État se mette résolument à la tête de l’industrie ; qu’il fasse converger tous les efforts ; qu’il rallie autour d’un même principe tous les intérêts aujourd’hui en lutte : combien son action à l’extérieur ne serait-elle pas plus nette, plus féconde, plus heureusement décisive ! Ce ne seraient donc pas seulement les crises qui éclatent au milieu de nous qui seraient prévenues par la réorganisation du travail ; mais, en grande partie, celles que nous apporte le vent qui enfle les voiles de nos vaisseaux.

Ai-je besoin de continuer l’énumération des avantages que produirait ce nouveau système ? Dans le monde industriel où nous vivons, toute