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font ressortir les mêmes qualités, sa beauté, sa vertu et sa piété. Le poète Hélinand la compare à la fleur qui règne dans la prairie ou à la vierge du voisinage[1].

C’est à Senlis qu’elle fut fiancée à Philippe-Auguste par l’archevêque Gui de Sens[2]. Le jeune roi agit en cela contre la volonté de sa mère et des amis du côté de sa mère, surtout aussi contre la volonté de l’archevêque Guillaume de Reims qui revendiquait pour le siège de Saint-Remi toutes les cérémonies touchant la famille royale. Le choix de la ville de Senlis était motivé par les relations de l’évêque Henri avec les comtes hennuyers et par la proximité des territoires alors possédés par le comte de Flandre.


Intervention de l’Angleterre.


En 1177, le comte de Flandre avait promis au roi Henri II de ne pas marier sans son consentement ses nièces, filles du comte Mathieu de Boulogne, dont il était le tuteur[3]. L’Angleterre avait toujours à redouter que le comté de Boulogne, indispensable à ses communications avec le continent, n’échût à un baron hostile. Nous avons déjà vu que la violation d’un serment ne pesait pas beaucoup sur la conscience de Philippe. Et, s’il cherchait une occasion de se débarrasser de cette convention gênante, les circonstances le favorisaient à merveille.

Au commencement de l’année 1180, de graves événements se préparaient en Allemagne. Le châtiment que Henri le Lion, duc de Saxe et de Bavière, avait encouru par son indomptable fierté et ses velléités despotiques à l’égard du clergé, n’allait plus être différé. On sait qu’il avait épousé, en 1168, Mathilde, fille de Henri II. De cette façon, une communauté d’intérêts anglo-guelfes s’était formée contre le grand empereur de la maison de Souabe, Frédéric Barberousse. Le comte de Flandre, qui était en très bons termes avec l’empereur, espérait sans doute que Henri II, forcé de fixer son attention sur l’Allemagne, ne saurait faire face en même temps aux intrigues qu’il tramait.

  1. A. Dinaux, Trouvères, III, p. 385.
  2. Fragm. hisr., Rec, XII, p. 287 A ; Geoffroi de Courlon, p. 494.
  3. Cartellieri, p. 25. — Wauters, Diplômes imprimés de la Belgique, III, p. 601.