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la population de la ville et celle du village, on ne remarque pas de contraste violent. C’est une erreur de voir dans les bourgeois des mercatores : ils sont tout simplement les possesseurs du sol de la commune. La condition des personnes et la condition des terres dans la Stadtgemeinde sont les mêmes que dans la Landgemeinde. Et pour achever de se convaincre de leur étroite parenté, il suffit de remarquer que l’une et l’autre possèdent une Allmende et que la banlieue urbaine coïncide à l’origine avec une circonscription rurale.

Il faut reconnaître aux livres de M. von Below un grand mérite : celui d’une parfaite clarté et d’une grande précision. L’auteur a soumis à une critique pénétrante les systèmes de ses devanciers et fait paraître en pleine lumière leurs points faibles ou leurs exagérations. Si on ne peut s’empêcher souvent de le trouver trop radical et trop simpliste, on doit reconnaître cependant la haute valeur et l’influence salutaire de ses ouvrages. En attaquant à la fois toutes les doctrines régnantes, ils n’ont pas peu contribué à la recrudescence d’activité que l’on remarque actuellement dans les études d’histoire municipale. Les derniers travaux de MM. Gross, Hegel et Sohm en ont largement profité : c’est dire assez quelle est leur importance.

Mais M. von Below ne se borne pas au rôle de critique. Il veut, on l’a vu, ramener à la doctrine de von Maurer, remaniée, il est vrai, et transformée, les chercheurs éparpillés sur des routes diverses, en quête d’une solution. Malheureusement son système prête le flanc, lui aussi, à des objections très graves. Esprit essentiellement juridique, M. von Below n’a pas tenu compte suffisamment, semble-t-il, des facteurs sociaux du problème. L’analyse juridique ne suffit pas à rendre compte de tous les éléments qui ont collaboré à la formation des villes. La renaissance du commerce et de l’industrie au moyen âge a si profondément modifié les conditions de la vie économique qu’il est impossible d’expliquer les constitutions urbaines par l’organisme primitif de la commune rurale. On a peut-être exagéré l’influence des marchés sur l’origine des villes, mais il paraît bien cependant qu’il faille voir avant tout, dans la bourgeoisie, une classe de marchands et dans le droit municipal un droit nouveau approprié à un nouvel état de choses. D’ailleurs, les preuves apportées par M. von Below à l’appui de sa théorie ne sont pas convaincantes. Tout d’abord, pour que l’on fût en droit de rattacher la juridiction du conseil urbaine la juridiction du Burding, il faudrait que l’on pût démontrer l’existence de celle-ci à une époque très ancienne. Or, avant l’apparition des villes, nous ne voyons pas de communautés de village en possession d’une juridiction autonome[1]. En outre, et cette objection

  1. Lamprecht, Deutsches Wirthschaftsleben, I, p. 118 et suiv.