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la juridiction en matière des poids et mesures, qui, comme appendices du tonlieu, avaient jusque-là appartenu au justicier[1]. Désormais, c’est elle qui nomme les thelonearii, les rewards, les jurés, les vinders, la foule des inspecteurs et des contrôleurs de l’activité économique. Les ministeriales, auxquels le soin de percevoir le tonlieu et d’en exercer la juridiction avait été confié jadis, disparaissent de la ville. En même temps, les amendes seigneuriales sont diminuées : de soixante sous elles tombent ordinairement à cinq ou à sept sous[2].

Si le tonlieu n’a pas disparu, mais s’est transformé en passant aux mains du conseil[3], il en est autrement d’autres justices qui, incompatibles avec la libre expansion de la vie urbaine, étaient irrémédiablement condamnées à disparaître. Je veux parler ici de ces traces que l’âge agricole a laissées sur la physionomie de la ville : fours et moulins banaux, auxquels le seigneur oblige les habitants à moudre leur blé et à cuire leur pain[4] ; monopoles de toutes espèces, en vertu desquels il a le privilège exclusif de vendre à certaines époques le vin de ses vignobles ou la viande de ses bestiaux[5] ; droit de gîte, qui impose aux bourgeois le devoir de lui fournir le logement et la subsistance lors de ses séjours dans la ville[6] ; droit de réquisition, par lequel il

  1. C’est ainsi qu’il faut expliquer la compétence du conseil en matière de poids et mesures, sur laquelle M. von Below a tant insisté et qu’il considère comme exclusivement communale. Voyez à ce sujet l’ouvrage récent de M. G. Küntzel, Uber die Verwaltung des Maas und Gewichtswesens in Deutschland. Leipzig, 1894. — Sur l’identité de la justicia thelonei et de la juridiction en matière de poids et mesures, voyez en outre le texte de Dinant cité plus haut, p. 79, n, 2. Guiman, Cartul. de Saint-Vaast, p. 174 et suiv.
  2. On n’a pas assez remarqué ce fait très intéressant de la transformation de l’amende de 60 s., en matière de tonlieu, de poids et mesures, de banvin, etc., en une amende de 5 ou de 7 s. Les textes sont cependant, à cet égard, nombreux et formels. Voyez, par exemple, les chartes d’Étampes, Ordonnances, XI, p. 183 ; de Sens, ibid., p. 262 ; de Soissons, ibid., p. 219 ; de Villeneuve en Beauvaisis, ibid., XI, p. 278 ; de Brusthem, Plot, Cartul. de Saint-Trond, I, p. 124 ; de Senlis, Flammermont, Senlis, p. 158. Cf. les plaintes de l’évêque de Soissons contre la commune. Langlois, Textes relatifs à l’histoire du Parlement, p. 14. Add., Prou, Coutumes de Lorris, p. 63. G. Kaufman, Zur Entstehung des Städtewesens, p. 11.
  3. Je considère le droit du conseil de régler l’exercice de l’industrie et de commerce dans la ville, de donner des règlements aux métiers, etc., comme dérivé du theloneum.
  4. Wauters, Hist. des libertés communales, Preuves, p. 13.
  5. Monum. de l’hist. du tiers état, I, p. 76. — Gengler, Stadtrechte, p. 451 ; Droit de Strasbourg, § 101 ; Tardif, Monum. hist., p. 181.
  6. Droit de Strasbourg, § 90-92 ; Warnkœnig-Gheldolf, Hist. de Flandre, I, p. 343 ; Tardif, Monum. hist., p. 180.